exagéré ; dans le seul district dont la ville de Bewan
fait partie, on prétend que l’on compte 20,000 âmes
en comprenant ceux qui habitent cette capitale et les
hommes des montagnes (je n’estime la population
de la ville qu’à 5 ou 6,000 âmes).
» Les habitants des montagnes sont agriculteurs ;
ce sont eux qui cultivent la terre et qui veillent aux
récoltes de riz, de cannelle, etc., etc. C’est la partie la
plus intéressante de la population. Leurs chefs ont
une grande influence sur eux. Presque tous ces montagnards
vont à cheval et voyagent toujours armés.
On a vu dans leur village beaucoup de bestiaux qui
forment, à ce qu’il paraît, leurs principales richesses.
Leurs habitations se ressentent aussi d’une meilleure
industrie ; elles sont plus grandes et plus régulièrement
bâties que celles des villes. Quant aux habitants
de la côte, Ils s’occupent principalement de la pêche
du tripang, de la nacre et des perles, en un mot de tout
ce que la mer peut leur donner. Ce sont eux qui commercent
avec les étrangers. Ils ne sont pas pirates
eux-mêmes, mais ils servent de receleurs aux pirates
de Mindanao.
» Les tribus montagnardes reconnaissent la suzeraineté
du sultan de Solo ; mais l’autorité de ce dernier
n’est qu’un patronage assez insignifiant. Le frère
du sultan est le principal chef de la montagne ; c’est
un homme actif et entreprenant ; il ne paraît pas
avoir pour son aîné une bien grande vénération, il
le regarde même, à ce qu’on m’a dit, comme un
personnage dénué de capacité, et il vient bien rarement
lui faire une visite, surtout depuis quelques
années.
» Il paraît d’ailleurs que les montagnards méprisent,
en général, les peuplades de la côte. Selon eux,
ces dernières déclinent tous les jours et perdent peu
à peu l’esprit guerrier qui les distinguait autrefois.
Ils attribuent ce changement dans leur caractère, à
l’abus de l’opium dont ils connaissent l’ivresse et les
enchantements, depuis une dizaine d’années. Ilsdoi-
vent cette importation aux premiers Chinois qui sont
venus s’établir parmi eux. Ils en consomment 25 à 80
caisses par an ; chaque caisse est, je crois, de 100 à
120 livres»
» Comme c’est le frère du sultan qui jouit de la
plus grande influence sur les hordes montagnardes,
celles-ci veillent à la sûreté du pays en unissant leurs
forces à celles de la ville, pour repousser toute invasion
étrangère. On m’a assuré qu au premier appel
le sultan pourrait facilement rassembler quatre mille
combattants armés de lances, de boucliers et de kriss,
cette assertion ne m’a pas étonné : comme ces insulaires
sont toujours armés , ils sont par cela même
tous soldats et prêts à défendre leur pays. Ce qui m’a
surpris davantage a été d’apprendre que le| sultan
comptait 5 à 600 fusiliers, parmi ceux qu’il pouvait
réunir au premier coup de tam-tam.
» La lance à pointe de fer, le kriss droit et flamboyant,
sont leurs armes offensives, qui toutes
sont fabriquées dans l’île. Le bouclier, dont ces peuples
se servent avec beaucoup d’adresse, n’est pas la