1839. terre et armés de quelques mauvais canons. Les em-
Juillet. , . , brasures de ces pièces sont comme des meurtrières,
et elles sont tellement petites, que les canons ne peuvent
tirer que dans une seule direction. A l’extrémité
de ce canal il existe une autre forteresse du même
genre, plus grande et dominant toutes les autres. Elle
est isolée par les eaux de la rivière qui la baignent
de tous côtés ; elle ne communique avec la terre
ferme que par une chaussée très-étroite et un grand
pont. C’est la résidence du sultan y au-dessus de laquelle
flotte le pavillon blanc de Solo.
Nos canots arrivèrent en bon ordre à l’entrée de la
rivière. La vue des mousquets que portaient nos marins,
celle des pierriers et des espingoles qui garnis'-
saient l’avant de nos embarcations; enfin le nombre
des officiers, tous en tenue brillante et armés pour la
plupart de fusils à deux coups, vinrent réveiller toutes
les craintes des naturels. Tous les ponts en bambous;
• sous lesquels nos embarcations étaient obligées de
passer, se couvrirent de guerriers armés de kriss et
de lances. L’àspect de la population était vraiment
menaçant. Nous n’en continuâmes pas moins notre
. marche dans le canal, et nous vînmes prendre terre
sur la plage de la chaussée située à droite: du palais
du sultan et à côté de plusieurs tombeaux. Les eaux
étaient assez basses, en sorte que le débarquement
n’était point facile. Les embarcations qui portaient
nos hommes armés arrivèrent les premières, et lôrsr
que j’acostai lerivage avec M. Jacquinot, je trouvai
nos deux détachements rangés en bon ordre et en
bataille sur la plage. Une foule immense , paraissant
en proie à la plus vive excitation, les entourait en
agitant des kriss. Nous attendîmes pendant quelque
temps avant de nous engager dans la ville ; enfin , au
bout de dix minutes, arriva Datou - Molou, capitaine
du port, remplissant les fonctions de ministre de
la marine. C’était lui qui avait écrit au rojdes Français
la lettre dont le contenu avait motivé ma présence sur
la rade; c’était lui qui s’était chargé, la veille, de
transmettre les réponses du sultan à notre demande.
Il paraissait inquiet et contrarié par le tumulte qui
s’était élevé dans la ville à la vue de nos hommes armés ;
et il ne pouvait dissimuler ses craintes au milieu
d’une population aussi méfiante et aussi turbulente
que celle qui nous entourait. Je m’empressai, pour
le rassurer, de lui faire entendre que les marins qui
nous accompagnaient n’étaient là que pour faire honneur
au sultan * et que notre visite était tout amicale.
Enfin Molou, après avoir hésité?à nous introduire
dans la ville, pressé par mes demandés, n’osa plus reculer,
et, prenant bravement son parti, il nous conduisit,
en me donnant la main, vers la forteresse du sultan.
Il nous fallut franchir d’abord des ponts très-étroits,
puis ensuite une espèce de couloir entre deux enceintes
de palissades, qui, en cas d’attaque, aurait rendu
notre retraite très-diflicile. Toutefois je ne prévoyais
pas la possibilité d’un pareil dénoûment, bien que
nous fussions suivis par une foule nombreuse et que
l’agitation fût à son comble. Bientôt après nou s fûmes
introduits directement dans le dalem (résidence du
vu- Il