de dix-lmit à vingt. À peine avions-nous fait quelques
pas, qu’un indigène vint nous dissuader, en espagnol,
d’aller plus avant. Il pourrait vous arriver
malheur, noiis disait-il. Il vaut mieux retourner à
votre bord. La nuit, on pourrait vous faire du mal.
En un mot, cet homme nous disait clairement qu’en
nous aventurant plus loin, nous courions des dangers
quej’étais peu désireux de braver sans nécessité. L’aspect
des hommes, leur figure féroce et divers petits incidents
survenus dans notre trajet me faisaient regretter
de n’avoir aucune arme sur moi. Toutefois mes
compagnons, qui ne paraissaient pas partager mes
craintes, rejoignirent avec moi le canot où nous l’avions
laissé, et bientôt après nous atteignîmes le bord, Lors
de notre retour, les habitants de Solo continuèrent à
porter la main à leurs armes pendant que nous, passions.
Au moment d’embarquer, l’un d’eux vint nous
•demander pourquoi nous étions venus à terre; on
lui répondit que c’était pour nous promener, «Et pour
voir aussi, » reprit-il.
Ainsi, il était évident que, malgré la démarche
qui avait été faite dans la journée par M, Duroch,
auprès du sultan, les habitants de Solo continuaient
à voir en nous des ennemis cherchant par la ruse à
prendre toutes nos prémutions pour les attaquer plus
sûrement. Comme je l’ai déjà dit , je n’en persistai
pas moins dans l’idée que j’avais de faire le lendemain
une visite au sultan ; et pour lui donner toute la
pompe possible, je décidai que tous les officiers qui
voudraient m’accompagner seraient en uniforme ;
qu’en outre, douze hommes de chaque navire descen- «»•
Juillet. draient avec leurs armes et formeraient une garde
d’honneur. Par mesure de précaution et dans l’éventualité
qu’un exercice à feu pourrait donner à ces
pirates une haute idée de nos forces, chaque homme
dut avoir sa cartouchière parfaitement garnie.
A huit heures du matin, les embarcations chargées 22
de monde et portant les couleurs nationales se dirigèrent
sur la ville ; au même instant l'Astrolabe fit un
salut de treize coups de canon, et nos deux corvettes
déployèrent leurs grandes enseignes. Les tambours
et les fifres, placés sur l’avant des canots, exécutèrent
pendant le trajet dès marches guerrières,
La ville de Solo est située à l’embouchure d’une
rivière qui se jette dans la mer au fond de la baie P1- oxxxix.
Bewan. Toutes les maisons sont bâties au-dessus de
l’eau ët reposent sur des pilotis ; elles communiquent
entre elles par des ponts en planches, très-étroits,
que l’on enlève à volonté, et qui permettent de les
isoler, soit séparément, soit par quartiers. Elles sont
disposées sur les deux rives de manière à laisser entre
elles un grand espace libre qui forme , à proprement
parler, le lit de la rivière , ét qui sert à la navigation
des pirogues et des barques. Du côté de l’Est et du
Sud, ces maisons communiquent à la terre ferme par
des ponts en bambous. On remarque encore sur la
rive droite de la rivière une enceinte qui entoure la
ville, et qui est formée par des palissades de dix à
douze pieds d’élévation. Cette enceinte s’appuie sur
deux petits forts, formés aussi par des pieux fichés en