1839.
Juillet. ouverte sur une de ses faces, et laissant autour d’elle
une galerie de cinq à six pieds de largeur. Cette galerie
était encombrée de ballots, de marchandises.
Quelques mauvais meubles d’Europe, de grands bahuts
, quatre ou cinq fauteuils et chaises de rotin en
composaient l’ameublement. La chambre intérieure
était plus somptueusement ornée. De belles tentures
en soie garnissaient le plafond, les murailles, et un
grand tapis couvrait tout le plancher. Mon homme
s’accroupit et s’étala nonchalamment sur une pile de
coussins ? je pris place à côté do lui.
» Nous nous secouâmes une seconde fois la main,
puis, il m’offrit un Cigare du plus fin tabac de Manille.
Je lui exposai le but de ma visite, ét lui dis
que le commandant m’avait envoyé à terre pour présenter
ses respects au sultan ; quë nous arrivions fatigués
d’iine longue et pénible navigation; qu’il nous
fallait des vivres frais, de l’eau et une placé à terre
pour faire nos observations. Les habitants ne savaient
trop à quelle nation nous appartenions; à nos couleurs,
ils nous avaient pris pour des Hollandais, et
c’était là ce qui avait Jeté F alarme dans toute la population
; Datou-Molou me fit répéter à plusieurs reprises
que nous étions Français, et traduisit mes paroles
aux nombreux témoins de cette scène.
» Il finit enfin par me dire (sans qu’il fût le moins
du monde question du sultan ) , qu’il avait, lu i,
Datou - Molou, écrit par un navire du commerce à
notre roi dans le but de lier avec la France dès relations
commerciales. Je lui répondis aussitôt qu’ayant
appris ce fait à Sincapour, le- commandant était
venu exprès à Solo pour répondre à ses avances. A
ces mots, les figures patibulaires de l’auditoire se déridèrent
un peu, et cependant toujours méfiants,
ils n’accueillirent pas cette ouverture aussi bien, que
je l’aurais cru. Enfin, chose curieuse, quand notre
conversation fut sur le point de finir, il me demanda
de nouveau , ses yeux cherchant à lire dans le fond
de mon âme, s’il était bien vrai que nous n’étions
pas Hollandais ; sur ce, nous levâmes la séance et il
me dit qu’il voulait me conduire lui-même chez le
sultan.
.» Nous partîmes, en effet, escortés par une foule considérable
et très-turbulente : pour indiquer que la
plus grande amitié nous unissait, le ministre me tenait
par la main droite, et ce fut ainsi que nous traversâmes
la place au fond de laquelle s’élevait le
palais du sultan. C’était, comme celle du ministre,
une grande maison en bois, élevée de quelques pieds
au-dessus du sol ; un escalier de plusieurs marches
conduisait sur une plate-forme précédant l’entrée
des appartements ; autour de l’édifice., régnait un
rang de palissades de quinze à vingt pieds de hauteur.
» Nous fûmes introduits dans une grande salle carrée
toute simple; les murs, le plafond, étaient entièrement
nus; la foule nous avait devancés et n’avait laissé
qu’un vide égal à l’épaisseur de nos corps; ce ne
fut qu’après avoir traversé cette haie vivante que je
me trouvai enfin en face du souverain de l’endroit.