Sans énumérer toutes les vertus que l’on attribue à
cette dégoûtante composition, nous citerons son action
stimulante sur les organes digestifs, que les
grandes chaleurs tendent à énerver ; le bétel est tour
à tour stimulant, calmant, excitant, et rafraîchissant.
Enfin les habitants de Makassar sont si persuadés
de la vertu de ce spécifique, qu’ils travaillent sans
cesse à charger leur bouche avec la noix d’arek, la
chaux et la feuille du b é te l, auxquels ils adjoignent
une copieuse chique de tabac pour rendre le régal
plus savoureux; mais cet usage, qui est général, n’est
pas le plus pernicieux. L’eau-de-vie de coco et l’arack
trouvent du débit chez le plus grand nombre de ces
sectateurs de Mahomet, qui, ne pouvant encore apercevoir
un paradis de délices dans les fumées de
ces boissons enivrantes, ont trop souvent recours à
l’opium.
« Le poignard connu sous le nom de kris, est l’arme
favorite de tous les habitants de Makassar ; tous chérissent
cet instrument de la plus lâche vengeance.
On dit pourtant que quelquefois les Makassars sont
braves et aguerris ; on a même vanté les vertus guerrières
des Javanais, des Malais, et de quelques autres
peuples de l’Inde; mais il est difiicile de croire à la
bravoure de ces hommes qui ne savent se venger
qu’avec le poignard et le poison, de ces peuples qui,
nombreux et aguerris, se sont laissé subjuguer par
une poignée d’Européens.
« Le kris à lame tantôt droite tantôt courbe ou
flamboyante, orne donc la ceinture det ous les habitants
; ces armes, excellentes pour un assassin, ne valent
rien pour un homme de coeur qui veut attaquer
son ennemi en face, et au grand jour. La poignée
en est si mal entendue, la lame si mal emmanchée,
que la main du combattant reste toujours découverte,
et que la lame est toujours prête à s’échapper
de sa monture : quoi qu’il en so it, la fabrication
de cette arme suppose de la part de ceux qui exercent
cette industrie une certaine entente de la manipulation
du fer. Les lames, longues de huit à dix
décimètres, sont faites de fer doux corroyé de telle
manière, que les nombreuses soudures du métal feuilleté
forment une sorte de damassé en relief, dont la
finesse peut jusqu’à un certain point donner une idée
du travail et de l’habileté de l’ouvrier ; quelquefois
l’argent et l’or ciselés dans ces cannelures forment
sur le plat de la lame, des dessins très-variés qui ajoutent
beaucoup à la valeur des kris ; mais cette arme,
souvent empoisonnée et dont la blessure e st, dit-on,
presque toujours mortelle, est d’une trempe si faible,
si tant est qu’elle en ait u n e , que nos mauvais couteaux
peuvent l’entamer sans peine. Les kris sont les
objets d’industrie les plus importants de Makassar. Ce
poignard y est si commun que les indigènes nous le
cèdent le plus souvent pour iO ou 15 francs : on en
cite cependant qui sont mis par leurs possesseurs à
un très-haut prix, moins à cause de la richesse des
ornements qu’à cause des services qu’ils peuvent avoir
déjà rendus. »
Les guerriers de Célèbes se servent aussi de lances.
1839.
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