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Î839.
Mai. et Montravel. Tous les officiers et les naturalistes
que les besoins du service ne retenaient point à bord,
se hâtèrent d’aller explorer le village et ses alentours
dans toutes les directions. Quelques douleurs que je
ressentais à la jambe droite ne me permirent pas de
m’éloigner du village où je fus de nouveau poursuivi
par Safi-Rouddin; les provisions de poules et de légumes
y étaient abondantes mais très-chères ; les naturels
ne voulaient que des piastres, des fusils ou de la
poudre. Trois poules coûtaient près de six francs;
malgré ce prix élevé nos gamelles firent de nombreux
achats. Les naturels vendirent à nos gens
presque toutes leurs coquilles. Safi-Rouddin parvint
même à se débarrasser avec moi de presque toute sa
collection, il est vrai qu’il rabattit un peu de ses prétentions,
et ensuite je lui devais un dédommagement
, voici pourquoi : sur ma demande il avait
prêté un grand vase en terre à mes canotiers pour
faire cuire leur dîner, mais il y avait mis pour condition
que ceux-ci n’y feraient point cuire de cochon
; or, mes hommes n’avaient que du lard) pour
leur dîner ; le cas était difficile à résoudre, et comme ils
avaient vu Safi-Rouddin boire avec volupté plusieurs
verres de vin malgré la défense du prophète, ils en
conclurent que mon ami VOrang-Kaya pourrait bien
encore faire taire ses scrupules de musulman à l’endroit
du cochon ; mais à cet égard ils furent trompés,
Safi-Rouddin, en vrai croyant qu’il était, avait une telle
horreur pour la chair de porc qu’il ne voulut jamais
reprendre le vase en terre qu’il avait prêté, et qu’il
préféra l’abandonner plutôt que de le voir rentrer
dans sa maison.
Du reste, cette horreur pour le cochon est telle
parmi les habitants de Warrou, que ces animaux malfaisants,
qui se multiplient rapidement dans la forêt
où on les laisse jouir d’une tranquilité parfaite, dévastent
toutes les plantations qui ne sont point garanties
par une clôture. Il arrivera certainement un
moment où ils seront tellement nombreux que les
indigènes seront forcés de les détruire pour se débarrasser
de leur importun voisinage. C’était là une
bonne fortune pour nos chasseurs dont ils profitèrent
le même soir ; mais comme ils passèrent encore la
nuit du lendemain à poursuivre leur proie, nous
attendrons leur retour pour faire connaître leurs récits
et leurs succès.
A cinq heures chacun avait rallié le bord. Chacun
racontait ses impressions ou ses aventures; et
tous s’accordaient à reconnaître l’avidité extrême
des habitants et leur caractère peu hospitalier. Il
n’était, en effet, arrivé à personne d’être invité par
les indigènes à entrer dans leurs maisons ; c était
tout au plus s’ils souffraient dans leurs demeures la
présence des Européens, lorsque ceux-ci s’y introduisaient
pour acheter quelques objets.
M. Dubouzet paraît avoir été le seul qui ait pu
visiter un arafoura ou alfoura; nous citerons textuellement
les impressions consignées dans son journal;
elles complètent les renseignements qu’il nous
fut possible de recueillir sur ce point pendant no1839.
Mai.
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