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 ses nouveaux  amis  qui,  après  nous  avoir  comblés  de  
 politesses, nous accompagnent de leurs voeux pour  le  
 succès de notre expédition. Puis chacun se retire à son  
 bord où tout est prêt pour l’appareillage du lendemain. 
 L’archipel  Banda  ne  tire  point  son  importance de  
 l’étendue de  ses  terres,  qui  sont  toutes  fort  petites,  
 mais  bien  de  ses  productions.  Il  est  aujourd’hui  le  
 plus  beau  joyau  de  la  puissance  hollandaise  dans  
 les Moluques.  De tout  temps,  ce petit  archipel  a  été  
 réputé pour  l’excellente  qualité  de ses  épices et  surtout  
 de ses muscades. Le gouvernement  s’est toujours  
 réservé  le monopole  des  épices,  et  aujourd’hui  encore  
 il  en  retire de  très-grands  avantages,  malgré la  
 concurrence  que  íes  établissements  anglais  sur  la  
 Péninsule malaise font à  ceux des Hollandais dans les  
 Moluques.  Nulle  part  le  muscadier  n’a  pris  plus  de  
 développement  que sur  le groupe des  iles  Banda.  Le  
 gouvernement de Batavia, q u i, pendant si longtemps,  
 fournit  exclusivement toutes  les  épices  de  l’Europe,  
 s’attacha  à laisser  à  ce  petit archipel  le  privilège  exclusif  
 de là  culture de la muscade. 
 Avant la conquête du groupe par les Hollandais, en  
 1621,  une  population belliqueuse habitait les iles de  
 Banda;  son  amour  pour  l’indépendance,  sa  valeur  
 causèrent  sa  ruine ;  les  vainqueurs  ne  crurent  leur  
 conquête bien  assurée  que  lorsque tous  les habitants  
 primitifs  de  ces  contrées  furent  exterminés dans  les  
 guerres ,  ou  se furent  volontairement  exilés  pour ne  
 point  travailler  comme  esclaves  sur  le  sol  dont  ils 
 étaient  dépossédés.  La Compagnie  des  Indes  se  hâta  
 alors de partager le terrain conquis entre ses partisans.  
 L’île Lonthoir que nous  venons  de  visiter,  fut divisée  
 en vingt-quatre parts et concédée à titre de fermes perpétuelles  
 à vingt-quatre métis provenant d’Européens,  
 dont  les familles se fixèrent  sur  le  sol  et  devinrent la  
 noblesse réelle du  pays.  La Compagnie se réserva exclusivement  
 l’achat  et l’exportation  de  la  récolte  des  
 planteurs, qui durent se soumettre à livrer leurs denrées  
 au tarif fixé par  la Compagnie. Ceux-ci firent valoir  
 les  terrains qui  leur furent  abandonnés  avec des  
 esclaves  à  eu x ,  et  avec  des  condamnés  que  le  gouvernement  
 de  Java  y  envoie  chaque  année  pour  la  
 vie  ou  pour  un  temps  très-long.  L’importance  que  
 le  gouvernement  hollandais  attache  à  cette  petite  
 colonie,  et  la  nécessité  de  contenir  dans  le  devoir  
 les  nombreux  criminels  qui  y  sont  déportés  nécessitent  
 dans  ces îles  une  garnison nombreuse  chargée  
 d’occuper les  deux forts de Nassau et Belgica.  Le  rapport  
 annuel  des  îles  Banda  est  de  près  d’un million  
 et demi de florins ;  la  culture du muscadier constitue  
 leur  seule  richesse ;  isolées  et  éloignées  de  la  route  
 des  navires,  ces  petites  terres  ne  sont  susceptibles  
 d’aucun  commerce  spécial  ou  d’entrepôt  autre  que  
 celui  produit  par  les  consommations  de  la  colonie  
 et les  ventes  de  ses  produits. 
 Les  perkemers  (c’est  le  nom  des  planteurs)  font  
 d’assez  bonnes affaires dans  l’exploitation  du sol  qui  
 leur  est  confié;  toutefois  ils  ne  sont  encore  aujour-  
 d hui  en  possession  du  terrain  qu’ils  cultivent  que  
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