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Enfin je me remis en route. Au bout d’un quart d’beure
demarcbe, mes vêtements étaient déjà secs. Soudain j’aperçus
trois naturels qui s’approcbèrent de moi ; vainement je les
engageai à me conduire dans leurs demeures, ils refusèrent
avec obstination, et finirent par me quitter lorsqu’ils virent
qu’ils n’avaient plus aucun cadeau à espérer. Une demi-beure
plus tard, je traversai le gué qui conduisait à la petite île de
l’Observatoire, où bientôt après, assis sous l ’abri protecteur de
la tente de M. Dumoulin, je pus prendre un repos nécessaire......
L’idiome des Australiens est fort difficile à connaître : les mots
ont d’étranges consonnes et une prononciation confuse ; souvent
on entend plutôt un gloussement que le son de la voix buraaine ;
sur dix naturels que nous avons vus, la moitié possède deux
manières bien différentes de nommer les mêmes choses. Diverses
épreuves m’ont pleinement convaincu qu’ils avaient deux dialectes
distincts dans la même baie ; peut-être n’est-ce , comme
on en voit de fréquents exemples dans TOcéanie, que des
manières de pai'ler propres à différentes classes de la population.
Nous avons cru apprendre de ces Australiens qu’ils
étaient divisés en trois classes, savoir : le% Mangiarolé, les
Mandroguelé et les Manbourgué, mais nous n’avons rien pu
acquérir de positif à l’égard du but ou de la cause de ces divisions
et de leur position relative; tout ce que j’ai pu remarquer,
c’est que les Mangiarolé semblent être supérieurs aux autres :
Miago et Mounougnou, les deux naturels qui m’ont plus particulièrement
donné les mots que je désirais recueillir, m’ont
paru s’accorder sur ce point.
Plusieurs d’entre eu x , du reste, semblaient avoir usurpé le
titre de Mangiarolé, car à plusieurs reprises Miago relevait
cette erreur et leur donnait le nom de Manbourgué ; je ne pense
pas qu’il Teùt fait si le premier titre n’eût pas été plus élevé ;
lui-même le prenait, et cette fois personne ne le contredisait.
aucun signe extérieur ne le distinguait cependant de ses compagnons
: tous avaient presque les mêmes tatouages en relief sur
le corps et une incisive de moins à la mâchoire supérieure.
Tous ces hommes se sont parfaitement conduits à bord;
doux, tranquilles, nonchalants, ils paraissaient n’avoir d’autres
désirs à satisfaire que la faim et le repos. Aucun d’eux ne voulut
me conduire, malgré mes instances , à leurs demeures ; Miago
lui-même s’y refusa , malgré mes cadeaux et mes sollicitations ;
aucun d’eux non plus ne mit quelques morceaux de biscuits de
côté pour sa famille ; il est difficile de croire qu’ils n’en aient
pas, d’où sortirait d’ailleurs un enfant de sept à huit ans que
nous avons vu avec eux ?
, (Af. Desgraz. )
Note 15, page 60.
Le 5 , au point du jour, nous aperçûmes le côtre anglais
mouillé à quelque distance de nous : il était arrivé pendant la
nuit et était parti d’Essington avec l’ingénieur anglais et deux
aspirants pour tracer des lignes desonde. A six beures, nous
mîmes sous voiles avec beau temps et jolie brise de S .-E. : ce petit
bateau imita notre manoeuvre ; nous nous dirigeâmes pour prolonger
la côte avec Tintention d’aller jeter Tancre dans le g o lfe,
près du nouvel établissement britannique. Plein de confiance
sur cette route, que les Anglais m’avaient signalée comme saine
et sans dangers, je naviguai par le travers de VAstrolabe à petite
distance , lorsque, à neuf beures, une assez forte secousse m’avertit
que la Zélée venait de toucher ; elle s’arrêta immédiatement
, et la sonde jetée aussitôt autour du navire fit voir que
la corvette était tenue par le milieu sur un rocher plat de peu
d’étendue sur lequel il n’y avait que deux brasses d’eau. L’arrière
et Tavant étaient libres, et à quelques pieds de nous le fond était
suffisant pour notre tirant d’eau.
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