Ordinairement ils rôdaient autour de l’établissement,
dont ils suivaient les travaux sans y prendre aucune
part. Cependant quelques jours avant notre arrivée
une rixe s’était élevée entre ces sauvages et des pêcheurs
malais qui étaient venus récolter le tripang
dans la baie. Les deux camps en étaient venus aux
mains, et un homme avait été tué. Depuis lors, les
naturels, inquiets des conséquences de cette querelle,
s’étaient enfoncés dans l’intérieur des terres, et les
Anglais ne comptaient pas les revoir avant la fin de
la saison propre à la pêche du tripang qui pouvait
à chaque instant amener de nouveaux praos malais
sur la rade. Un camp de pêcheurs Bouguis était établi
au fond du port Essington. Comme ceux qui étaient
venus nous visiter au mouillage de la baie Bafles,
ils se hâtaient de récolter le tripang pour continuer
ensuite leur route et opérer leur retour à Makassar.
Le fortin que nous avions sous les yeux n’était
qu’une construction provisoire, suffisante pour attendre
l’époque où la colonie ayant pris un plus
grand développement, elle pourrait construire une
citadelle capable de la défendre. Dans l’état actuel
, cette construction ne manque pas cependant
d’une certaine solidité ; il est probable toutefois
qu’elle ne sera jamais d’une grande utilité. 11 faudrait
des circonstances bien étranges pour que jamais
une puissance pût songer à venir attaquer un
établissement dont la réussite est encore bien douteuse,
et bien avant que cette petite colonie ait assez
grandi pour inspirer des craintes, ces quelques ca11.%*=;
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V
nons auront pu être remplacés par des fortifications
plus respectables.
Nous quittâmes le fort pour parcourir le plateau
choisi pour y fonder la ville. Élevé au-dessus du niveau
de la mer, l’air s’y renouvelle avec assez de facilité
pour faire espérer que la salubrité doit y être
parfaite. Nous visitâmes l’hôpital où se trouvaient
quatre malades seulement dont trois blessés et un
nostalgique. C’est une maison en bois élevée sur
des pilotis d’un mètre environ au-dessus du sol et
affectant la forme d’un rectangle. Elle pouvait recevoir
de huit à dix lits. Nous visitâmes ensuite quelques
unes des habitations des soldats destinés à
former la garnison. Ces hommes, au nombre de
trente-sept, commandés par un capitaine et un
lieutenant, avaient construit eux-mêmes leurs demeures.
Toutes ces habitations étaient faites avec
goût, la plus grande propreté paraissait y régner ;
devant chacune d’elles se trouvait un petit carré de
terre cultivée, avec des clôtures. Quatre femmes mariées
à des soldats avaient suivi leurs maris dans
ces contrées lointaines ; elles habitaient avec eux dans
les petites maisonnettes qu’ils avaient construites.
Quant aux soldats non mariés, ils s’étaient généralement
mis deux ensemble pour élever leurs demeures
dont ils partageaient ensuite fabri. Chacun
de ces hommes avait ses armes auprès de lui; au
moindre signal il devait accourir pour défendre ses
foyers contre une agression inopinée de la part des
habilants. Dans la journée, ils s’occupaient des traf
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