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 A.'' 
 1839. 
 Avril. 
 gnèrentleur bateau. Longtemps encore après le départ  
 des  pêcheurs,  les naturels rôdèrent autour des chaudières  
 et des  hangars,  puis  ils finirent par  se  réunir  
 au  nombre  de  vingt-sept  au  bord  de  la  mer  sur  
 une  plage  de  sable.  Un  feu  fut  allumé,  tous  s’étendirent  
 sur le sable en formant un cercle autour du feu,  
 et en se couchant les uns sur les autres comme des bestiaux  
 dans une  écurie.  Parmi ces sauvages, trois seulement  
 étaient  armés  de  sagaies  qu’ils  lancent  au  
 loin  avec  beaucoup  de  dextérité.  Leur  attitude  était  
 des  plus  inoffensives ;  il  n’était pas  huit  heures  du  
 soir que tous dormaient paisiblement sans s’inquiéter  
 des moustiques. 
 « J’étais  sur  pied  lorsque  le  jour commença  à  paraître  
 et je  ne  tardai  pas  à  voir  les  embarcations  des  
 praos s’éloigner dans toutes les directions tout autour  
 de  l’île.  A  terre  les  feux  s’allumèrent  sous  les  chaudières. 
  Bientôt aussi les naturels envahirent ma tente;  
 quelques-uns  parmi  eux  cherchèrent  à  m’entraîner  
 vers leur camp, où je trouvai encore plusieurs d’entre  
 eux  accroupis  autour d’un  feu et mangeant quelques  
 coquillages qu’ils faisaient  auparavant  griller  sur  la  
 braise. Je ne tardai pasà comprendre quel avait pu être  
 leurmotif enme conduisant auprès d’eux : tousà l’envi  
 se  hâtèrent  de  me  tendre  la  main  en me  suppliant  
 de  leur  donner  à  manger.  C’était  un  spectacle  curieux  
 de voir ces malheureux faire les contorsions  les  
 plus extravagantes pour me prouver qu’ils  souffraient  
 de  la  faim;  du  reste  leur  voracité  est  surprenante:  
 ils  rôdaient  constamment  autour  des  Malais  en  les 
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 poursuivant de  leurs supplications, afin de  leur  arracher  
 quelques débris qu’ils dévoraient à l’instant.  Aux  
 Européens,  ils demandaient du pain ;  ils  suppliaient  
 les Malais de les régaler d’un peu de riz qu’ils avalaient  
 cru  et  sans même  le  goûter.  Un  instant les  pêcheurs  
 s’amusèrent  à  jeter  par  terre  quelques  poignées  de  
 riz  qu’ils  abandonnaient  à  ces  sauvages.  Aussitôt  
 toute  la  troupe  s’y  précipita  à  l’envi,  et  je  vis  ces  
 malheureux  avaler des poignées  de sable  oû  se  trouvaient  
 peut-être  mélangés  quelques  grains  de  r iz ,  
 afin d’assouvir  leur  faim. 
 «  J’avais  quitté la troupe des sauvages et je  rentrais  
 dans ma  tente  lorsque  j’aperçus  trois  autres  praos  
 portant  aussi  pavillon  hollandais  et  qui  entraient  
 dans la  baie.  Bientôt  ils  laissèrent  tomber  l’ancre,  
 mais  ce  fut  pour  peu  de  temps,  car  aussitôt  qu’ils  
 eurent  salué  le  commandant  d’Urville  et  présenté  
 leurs  papiers, ils se hâtèrent de  quitter  ce mouillage  
 oû  ils  se  trouvaient devancés.  Sur  ces  entrefaites  un  
 canot de V Astrolabe étant  venu  porter  quelques visiteurs  
 sur  l’île,  j’en  profitai  pour  aller  en  compagnie  
 de M. Rocquemaurel  visiter un des praos  les plus proches  
 oû nous fûmes reçus avec politesse et même avec  
 cordialité par le  patron ou  le  capitaine  du bateau :  il  
 nous  fit  parcourir  son petit navire  dont  nous pûmes  
 examiner  tous  les  détails.  La  carène  nons  parut  solidement  
 établie,  les  formes mêmes  ne  manquaient  
 pas d’élégance ; mais le plus grand désordre  semblait  
 régner dansl’arrimage ; au-dessus d’une espèce de pont  
 formé  par  des  bambous  et  des  claies  en  jonc,  on