d’iiui ; un nautile flambé passe le long du bord au
moment où les corvettes, poussées par une belle brise,
filent rapidement. Vainement je fais mettre une embarcation
à la mer pour ramasser cet échantillon si
précieux, puisque l’on ne connaît pas encore l’animal
vivant de cette coquille, qui est devenue si commune
; toute trace de ce précieux animal avait déjà
disparu, lorsque nous parvenons à arrêter l’aire du
bâtiment. Plus heureux que nos naturalistes, nos
harponneurs ne tardent pas à amener à bord, transpercé
de part en part, un des nombreux marsouins
qui jouent autour de nous. Il est le bien-venu sur
VAstrolabe, car si nos naturalistes y trouvent un
intéressant sujet d’étude dans l’intérêt des sciences
naturelles, nos matelots se réjouissent aussi de voir
venir dans leurs gamelles cette prise importante sur
laquelle ils n’avaient point compté.
Nous étions dans la saison des vents d’ouest. Bien
que depuis Banda nous eussions toujours rencontré
des calmes ou de faibles brises d’e st, la prudence
me commandait de ne point trop m’engager dans le
golfe formé par les terres de la Nouvelle-Guinée, au
nord du cap Walsh. Déjà dans la journée nous avions
traversé de nombreux espaces où l’eau décolorée annonçait
son peu de profondeur ; le soir, un cap très-
prononcé , le cap Champel, se dessinait devant nous,
la sonde n’indiquait plus que 25 brasses de fond, la
brise paraissait fixée à l’ouest et servir admirablement
mes projets de reconnaissance du détroit de
Torrès; aussi je me hâtai d’abandonner la terre de la
Nouvelle-Guinée et mettant le cap au sud, je fis route
pour rallier le cap Walsh, dont je voulais prendre
connaissance avant d’engager nos navires dans le
détroit.
Dès le lendemain, la terre avait entièrement disparu
derrière nous ; la sonde ne rapportait que 30 à
AO brasses, sur un fond de sable et de vase. Les vents
étaient très-variables , et parfois de forts grains, en
nous inondant de leurs eaux, venaient nous assaillir
par de fortes tourmentes, mais aussi de peu de durée.
De nombreux débris végétaux se montraient sur
la surface de la mer ; on aurait dit que le point que
nous parcourions était le réceptacle de tous les détritus
que les eaux fluviales enlevaient au rivage voisin.
Sans doute les vents d’ouest régnent depuis longtemps
dans ces parages et tous les débris répandus
dans les mers de Timor, obéissant à leur impulsion
, viennent se réunir au fond de la vaste baie
formée par la Nouvelle-Hollande et la Nouvelle-Guinée.
Au milieu de ces débris s’agitent des milliers de
serpents d’eau dont plusieurs atteignent des dimensions
considérables. Nous remarquons encore un
grand nombre de méduses et des mollusques de plusieurs
espèces, des crabes qui parcourent la surface
de la mer. Enfin, de nombreuses et grandes tortues
passent le long du bord et viennent réveiller l’ardeur
de nos pêcheurs. Bientôt l’une d’elles, d’une grande
taille, est frappée par le harpon, malgré son épaisse
carapace, et vient faire une agréable diversion sur nos
tables. Les marsouins et les requins abondent aussi, et