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288 NOTES.
devait faire sa première station; un trois-mâts et un brig hollandais
se trouvaient au mouillage près de la pointe nord du village,
ainsi qu’un grand nombre de pros et de barques malaises ; nous
rencontrâmes sur notre route un pros pavoisé de banderolles flottantes
et monté par des naturels qui se livraient, au son du
gong, à des danses gracieuses quoique bizarres: à notre approche
les chants et les danses cessèrent, les femmes se cachèrent
au fond de la pirogue, et l’inquiétude parut sur tous les
visages ; je fis lever rames et ayant cherché à rassurer le chef
de la pirogue, nous employâmes tout notre malais pour en tirer
quelques renseignements sur la longueur du canal: je lui proposai
d’embarquer dans le canot et de nous conduire à quelque
village dans le canal où nous pussions nous établir pour la
nuit : cette proposition ne parut nullement leur agréer , et je ne
pus en tirer que des renseignements contradictoires ; les ayant
quittés je continuai ma route, j’arrivai à 6 lieureset demie près de
la pointe ouest du canal, j’interrogeai la terre de tout côté pour
trouver une plage , mais partout les palétuviers avaient envahi la
côte et l’avaient rendue inabordable. On aperçut alors dans le nord
unenfoncementoùdeuxbarquessetrouvaient mouillées ; jelaissai
porter dessus en hissant toutes les voiles : pendant quelque temps
les embarcations nous servirent de direction, mais à notre approche
elles disparurent comme par enchantement au milieu
des palétuviers ; arrivés promptement à l’enfoncement où elles
avaient été vues, nous nous trouvâmes à l’embouchure d’une
rivière ou d’un petit canal large d’une longueur de navire , où
nous pénétrâmes espérant y trouver un endroit propre au débarquement;
mais là comme ailleurs, les palétuviers nous offraient
un obstacle insurmontable , et la terre était submergée
aussi loin que l’oeil pouvait pénétrer dans le fourré du bois.
La nuit close étant survenue, je mouillai à une demi-mille
environ , dans Tintérieur du canal ; les tentes furent faites
et l’embarcation disposée pour que tout le monde pût y coucher;
les canotiers étaient fatigués et tristes , leurs effets étaient complètement
mouillés; le souper consistait en lard; il fallait le
manger cru, et l’impossibilité de descendre à terre et d’y allumer
du feu , était pour nous tous le présage d’une fort mauvaise
nuit.
D’un autre côté, le canot était parfaitement â Tabri; j’avais
fait route jusqu’au dernier moment, et j’étais à portée de faire
le lendemain à la pointe du jour une station à l’entrée du canal,
où je voulais pénétrer aussi loin que la dernière limite de temps
que nos instructions m’avaient prescrite, me le permettrait.
Le 19 avril, à 5 heures du matin, nous quittions le mouillage.
Arrivés dans la portion du canal qui court au S. 48°E., notre
attention fut attirée par un grand bruit de tam-tams, qui se
faisait entendre derrière le rideau de palétuviers, qui depuis
notre entrée barrait la vue de tous côtés. Les canotiers n a-
vaient pas déjeuné et notre course devait être longue, il fallait
leur donner le temps et les moyens de faire cuire leurs vivres ;
j’espérai y réussir en donnant dans un petit canal, rapproché de
l’endroit où le bruit se faisait entendre ; en effet, quelques minutes
de route nous amenèrent à un débarcadère , où le même
pros que nous avions rencontré la veille accostait avec nous.
Les chants cessèrent et notre présence plaisait médiocrement
au chef de la pirogue; mais lui ayant manifesté mes intentions
bienveillantes par un présent, il mit à notre disposition une
case inhabitée et isolée , bâtie sur une éminence d’une vingtaine
de pieds, au bas de laquelle se trouvait le canot ; du sommet
on apercevait à quelques pas les sept ou huit cases élevees
sur pilotis, qui formaient le village dont Thomme de la pirogue
paraissait être le chef.
Cependant Tarrivée simultanée du canot et du pros semblait
avoir produit quelque émoi dans les habitations ; une
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