terreau nous séparait du feu souterrain de la montagne
, dont la fumée s’échappe par gerbes immenses
d’une longue fissure placée sur la partie occidentale.
Ce ne fut point sans regrets que nous dûmes renoncer
à voir de près l’ouverture principale du cratère
d’oû s’échappait ce long jet de fumée que nous avions
aperçu de si loin ; mais des fumeroles très-actives
nous en séparaient, et de temps à autre le vent, qui
n’était point régulier, poussait sur nous ces exhalaisons
méphitiques qui rendent toujours si dangereuses
les approches des volcans. Cependant nous parvînmes
très-près de l’ouverture principale. L’action était trop
intérieure pour rien y voir autre que de la fumée ; le
sol s’ébranlait sous nos pas et nous faisait craindre à
chaque instant que, s’affaissant sous notre poids, il ne
nous entraînât avec lui jusqu’au fond de l’abîme.
« Il était près de dix heures du matin lorsque nous
commençâmes â redescendre ; il nous fallut peu de
temps pour atteindre le pied de la montagne, et je
pus encore profiter de l’obligeance du docteur Kurt
pour aller visiter f ile Poulo-Pisang, résidence des
lépreux, avant de rentrer à bord. Cette île qui termine
la grande Banda vers f e s t , est entièrement réservée
â ces malheureux incurables. Deux ou iroismai-
sons leur servent de demeure. L’î l e , qui est presque
littéralement couverte de cocotiers, leur est entièrement
abandonnée, mais sous aucun prétexte ils ne
peuvent en franchir les limites. Le gouvernement accorde
à chacun d’eux une ration journalière, et de
temps â autre le médecin en chef est tenu de leur
faire une visite dont ils profitent pour exposer leurs
besoins. Une vingtaine de ces malheureux, couverts
de plaies hideuses de la tête aux pieds, traînaient
sur cet îlot leur chétive existence. Comme
pour faire contraste, je ne quittai f ile Puso-Pisang
que pour aller à bord de l’Astrolable me préparer â
assister, quelques heures plus tard, â une fête offerte
â nos états-majors par les membres de la société
de Eendracht. »
Le même soir, en effet, nous assistions à un bai
oû se trouvaient réunies toutes les autorités de la colonie
, et une quarantaine de dames toutes créoles.
La plus franche gaieté présidait à cette réunion;
mais la chaleur y était suffocante ; aussi je ne tardais
pas à me retirer â mon bord pour jouir de la
délicieuse fraîcheur de la nuit. Nos jeunes officiers,
â qui les plaisirs de la danse présentaient plus de
charmes qu’â moi, ne se retirèrent que lorsque déjà
la nuit était fort avancée, enchantés de l’accueil empressé
de leurs hôtes et amis.
Nous ne devons plus passer qu’une journée au
mouillage de Banda, aussi chacun se hâte de parcourir
cette intéressante colonie : les uns vont admirer
les beaux ombrages embaumés de f ile Lonthoir; d’autres
parcourent dans tous les sens la petite île Neira,
la plus importante, parce qu’elle est le siège de la colonie
; le soir tous les officiers se réunissent chez le résident
, qui m’avait retenu pour dîner avec une partie
de mon état-major. C’est au son delà musique, dans les
salons aérés et frais du gouvernement, au milieu de
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