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est si plat, que rien n’indique les cours d’eau qui doivent le
sillonner : nous eu cherchâmes vainement dans le voisinage de
l’établissement et ne pûmes trouver qu’un marais desséché. Je
doute qu’il existe au monde une position plus ingrate pour y
fonder une colonie. La baie Raffles, quoique ayant environ deux
lieues du nord au sud et une lieue de 1 est à 1 ouest, est tellement
rétrécie par les bancs qui en longent la cote qu il ne reste
qu’un très-petit espace de mer accessible aux navires de douze
à quinze pieds de tirant d’eau. Le meilleur mouillage se trouve
au sud-ouest, et à petite distance de Tîle de l ’Observatoire ; il semblait
donc, sous tous les rapports, plus convenable de s’établir dans
le voisinage de cette île ; mais que faire sur une terre brûlée par
le soleil, où il ne croît aucun de ces arbres à fruits qu’on trouve
en si grande abondance dans les îles de TOcéanie et les Moluques?
Quels avantages pouvait-on retirer d’une colonie si éloignée
des grandes voies commerciales, et qui ne produit rien
qui puisse attirer les navigateurs? Le sol de cette partie de
l ’Australie est sec et sablonneux, et ne paraît guère propre à la
culture des plantes et des arbres utiles. Le pays étant à peu près
désert, il faudrait, pour en tirer pai t i , y fixer des cultivateurs ;
or il est reconnu que dans les colonies intertropicales, les Européens
ne peuvent guère résister aux fatigues qu’entraînent les
travaux de l’agriculture ; à défaut d’indigènes il faudrait des
esclaves, et les Anglais affectent de ne pas vouloir d’un moyen
si contraire à la morale et à l’humanité. Il ne leur resterait donc
qu’à déporter sur ces trisles rivages les ouvriers sans travail qui
troublent plus d’une fois la tranquillité des grandes villes manufacturières
de la Grande Bretagne, ou enfin qu à enrôler
quelques-uns de leurs malheureux Hindous. Les Malais n a-
bandonueront jamais les îles Moluques, Célèbes, Céram , et
tant d’autres terres où la nature étale toutes ses richesses, pour
venir sur la côte australienne ; les Chinois émigrants préféreront
toujours à ces rivages sauvages les belles plaines de Java,
de Sumatra, Bornéo et les îles Philippines, qui depuis si longtemps
sont le théâtre de leur activité et de leur industrie. Mais
en s’établissant à la baie Raffles , les Anglais ont v ou lu , dit-on ,
avoir un port voisin du détroit de Torrès, par où passent quelques
uns de leurs navires pour aller du port Jackson en Chine
ou dans TInde ; ils ont voulu être à portée de la mer des Moluques
, où ils prétendent sans doute dominer un jour, à l’exclusion
des Hollandais, et pour porter les premiers coups au commerce
batave, il ne s’agissait de rien moins que de cultiver les
arbres à épices dans la nouvelle colonie, dans le cas où la
nature du terrain le permettrait. La Hollande n’aura jamais à
redouter une pareille concurrence ; car le jour où les Anglais
parviendront à obtenir la muscade et le girofle sur la côte nord
de la Nouvelle-Hollande, dans la Nouvelle-Guinée, ou sur
telles autres terres qu’il leur plaira d’occuper, les Hollandais
n’ont qu’à diminuer progressivement les entraves et les restrictions
qui pèsent sur le commerce et la culture dans les îles
Moluques, et l’Angleterre sera obligée de livrer à vil prix les
épices qu’elle aura obtenues avec tant de peines et de dépenses.
Enfin, le dernier avantage que l’Angleterre espérait retirer de
son établissement était la pêche des holothuries, ou tripangs,
qui abondent sur cette côte : les bateaux malais exploitent depuis
longues années cette branche d’industrie, dans laquelle ils
ne seront jamais supplantés par les Européens. Vainement
voudrait-on les attirer , les fixer dans la colonie, les assujettir à
quelques droits de pêche, ou attendre de grands bénéfices de la
vente des objets d’Europe ; le pêcheur malais se nourrit d’une
poignée de riz et d’un morceau de poisson sec, son vêtement ne
consiste le plus souvent qu’en un lambeau de toile de coton
roulé à la ceinture et un mouchoir autour de la tête. Il se procure
à bas prix ces objets à Batavia, Makassar, Amboine, et
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