Décembre. s e t e i^a i e n t posés tout près d’eux, et quelquefois même
au milieu d eux, ainsi que des troupes de graves et
impassibles pingouins.
Cette pointe une fois doublée, nous prolongeâmes
à deux ou trois milles de distance la côte nord du détroit,
terre d’une moyenne hauteur, avec des falaises
escarpées, du reste aride, pierreuse et d’une hideuse
nudité. Une brume très-épaisse nous dérobait entièrement
la côte méridionale du détroit.
Poussés rapidement par une brise fraîche du n o rd ,
nous filions avec vitesse sur une mer peu tourmentée;
aussi, à dix heures vingt minutes, nous passions au
sud-est a deux milles environ du cap Possession, et
des une heure quarante minutes nous donnions dans
le premier goulet. Comme nous arrivions vers la fin
de ce canal, la marée reversa et le jusant fu t, durant
une heure ou deux, si rapide, que tout ce que nous
pûmes gagner fut de nous maintenir sur place avec
un sillage de sept ou huit noeuds.
Les bords de ce canal sont formés de terres peu
e evees , pierreuses et très-stériles en apparence, car
en les examinant de près on les trouverait peut-être
bien tapissées de diverses plantes magellaniques.
Vers cinq heures j ’avais réussi, en ralliant de très-
pres la bande du sud-est, à sortir du goulet, et je me
trouvais dans ce vaste bassin situé entre les goulets
et qui reçut des Espagnols le nom de baie Saint-Phi-
hppe. La , je me croyais désormais à l’abri de tout
contre-temps, quand le vent a molli et la marée nous
a promptement entraînés en arrière de près de trois
milles. La Zélée, qui se trouvait un peu plus avant
que nous dans la baie, fut un moment en danger de
toucher à la côte, près de la pointe Baxa, et ne se dégagea
que par une rapide évolution.
Vers sept heures, le flot commença à se déclarer et
j ’en profitai pour courir des bordées contre le vent
d’O. S. 0 . et faire en sorte de m’élever dans le bassin
de Saint-Philippe. Cela fut assez bien durant une
heure, et nous gagnâmes d’une manière satisfaisante,
malgré les grains de vent et de pluie qui se succédaient
par intervalles. Mais le temps devenant de plus en
plus mauvais, les rafales ayant augmente et la nuit se
faisant très-noire, à neuf heures trente minutes, je
donnai l’ordre d’être prêt à mouiller et fis serrer
toutes les voiles. Au commandement mouille, la
chaîne de l’ancre de tribord fit decapeler de la bitte le
manchon en fer, elle s’engagea et ne put courir dans
l’écubier. Alors l’ancre resta suspendue et fortement
pressée par le courant sur la joue antérieure du navire,
de sorte qu’il devint impossible de la dégager.
Instruit de cet accident, je donnai sur-le-champ
l’ordre de mouiller l’ancre de bâbord et le même inconvénient
lui arriva. Alors j ordonnai de préparer
l’ancre de veille. C’eût été une position extrêmement
critique si nous eussions été près de la cote ; mais je
savais que j’en étais loin. D’ailléurs je présumais qu en
tous cas la force des courants m’eut maintenu dans
leur lit, et par conséquent à une certaine distance
des terres.
Mais ce qui vint compliquer notre position d’une