prochement avec le type des Nouveaux-Zélandais ; son
nez bosselé et presque aquilin, ses pommettes assez
saillantes et surtout sa figure moins élargie, me porteraient
à penser qu’il sera venu des rives de la Nouvelle
Zélande avec quelqu’un de ces pêcheurs de
phoques qui recrutent si souvent leurs équipages
dans cette contrée et qu’ennuyé de la navigation, il
sera aussi resté avec les Patagons ; ce qui fortifierait
cette conjecture, c’est que lui seul m’a offert quelques
traces de tatouage à la naissance du nez. Du
re s te , je n ’ai pu obtenir aucun renseignement positif
sur son compte.
Le long des pieux qui soutiennent les tentes, sont
suspendus des morceaux de chair de Guanaco; ils se
contentaient de la présenter quelques moments au feu,
puis ils la croquaient à belles dents à demi-crue, avec
des patelles qu’ils faisaient aussi rôtir un instant sur le
brasier. Les femmes et les enfants avalaient en outre
avidement les baies rouges d’un petit Empetrum
rampant, et les rendaient ensuite presque sans les
digérer, comme l’attestaient leurs excréments ; c’est
le cas de faire observer que ces gens sont très-sales à
cet égard, car ils ne se donnent même pas la peine de
s’éloigner de quelques pas de leurs tentes pour satisfaire
au premier besoin de la nature.
On me montra la plante dont ils emploient la
racine pour leur servir de pain, comme le font les
Nouveaux-Zélandais du Pteris esculenta; c’est une
espèce Azorella à fleurs jaunes, très-voisine, par la
forme, du gommier des Malouines ou Bolax glebaria.
J’ai goûté de ces racines et je leur ai trouvé un goût
légèrement sucré, point désagréable ; mais cet aliment
m’a paru fort peu nourrissant.
Ces gens, hommes et femmes, passent leur temps
nonchalamment étendus sur leurs peaux, au milieu
de leurs chiens et de leurs chevaux. Un de leurs
passe-temps favoris est de chercherla vermine dont
ils sont abondamment pourvus pour s’en régaler. Ils
redoutent tellement la moindre marche à p ie d ,
que pour aller chercher des coquilles au rivage,
à peine éloigné de 50 ou 60 pas, ils montent à
cheval.
A ma prière, le brave Kongre a revêtu son costume
de guerre; c’est un casque en cuir fortifié par des
plaques d’a ira in , bombé et surmonté par un beau
cimier en plumes de coq, et une tunique en cuir de
boeuf très-épais, teinte en rouge et bariolée de bandes
longitudinales jaunes; enfin, un long cimeterre à
double tranchant ; puis il a posé tandis que MM. Goupil,
Roquemaurel et Marescot s’efforçaient d’en faire
un croquis. Sous ce costume, le pauvre homme était
loin d’avoir un air belliqueux, car il semblait au contraire
honteux et confus et ne savait trop quelle attitude
prendre. Mais, de sa p a rt, cette complaisance
décélait un esprit plus éclairé et plus confiant que
chez ses compatriotes; ceux-ci refusaient à tout
prix de laisser prendre leur p o rtra it, dans la crainte
de quelque sortilège de notre part. Je témoignai ma
gratitude à Kongre en donnant une galette de biscuit
à son petit enfant, attention qui parut toucher les pa-
1838.
Janvier.
Pl. XIII.
Pl. XIV.
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