pâté que nous avions apporté avec nous sur le point culminant
du pic ; son utilité pour nous a lo rs, lui donnait droit à de pareils
honneurs, et après avoir rassemblé près de lui toutes nos provisions
, nous battîmes en brèche cette forteresse avec.une telle activité
qu’au bout de peu de temps tout avait disparu, et il ne restait
pas même pierre sur pierre. Jamais déjeûner ne fut trouvé
plus exquis, nous étions aussi fiers que joyeux de faire un pareil
repas à 1800 toises au-dessus du niveau de la mer, et pensions
que bien des gens nous envieraient un pareil bonheur. Après cet
excellent déjeûner, chacun de nous travailla à compléter sa collection
minéralogique ; et a midi précis, chargés de nos pierres et
de tous nos outils, nous commençâmes à descendre le Pain de
Sucre, opération qui s’exécuta souvent plus vite que nous ne
voulions et qui dura à peine dix minutes. Puis, sans nous arrêter,
nous continuâmes ainsi jusqu’à la Estancia, où nous fûmes
rendus à deux heures précises. Après tous les savants du premier
ordre, qui ont visité successivement le pic deTêyde, et leurs
théories si claires et si satisfaisantes sur sa formation, il y aurait
delà témérité de ma part à vouloir hasarder quelques idées sur
un pareil sujet que je n ai pu d ailleurs étudier que très—imparfaitement.
Notre but était seulement de mesurer de nouveau la
hauteur précise de la montagne, et d’y faire des observations
d’intensité magnétique. Grâce aux soins de MM. Dumoulin et
Coupvent, elles furent exécutées de la manière la plus satisfaisante.
Mes observations particulières se bornaient donc à constater
que les descriptions que j’avais lues, avant d’y monter, m’ont
paru on ne peut plus satisfaisantes.
Arrivés a la Estancia, nous ne perdîmes pas de temps pour
nous remettre en route, et traversâmes rapidement les Canadas,
qui cette fois n avaient plus le même intérêt pour nous. A mesure
que nous descendions, nous éprouvions un changement de température
et d atmosphère, qui nous faisait éprouver un bien-être
sensible. Quelque effort que nous fissions pour hâter le retour,
NOTES. 201
la nuit nous surprit encore dans les régions inhabitées, et il était
huit heures du soir, quand nous ralliâmes notre gîte à l’Orotava,
tous tellement fatigués, qu’à peine nous eûmes le courage de nous
mettre à table et de manger quelque chose avant de nous coucher.
J’aurais bien désiré pouvoir m’arrêter un jour à cette station, mais
dès le lendemain matin, nous reprîmes nos anciennes montures
et partîmes pour Sainte-Croix. Nous nous arrêtâmes durant quelques
temps à Laguna, pour y visiter deux églises assez belles,
dont l’une est remarquable par des boiseries qui 11e sont pas sans
mérite, et l’autre par une chaire soutenue par dès anges armés
d’un glaive, dont l’exécution est assez belle. Les églises me parurent
du reste décorées avec assez mauvais goût, malgré la richesse
des autels, où l’on voyait beaucoup de dorures et d’ornements
d’argent massif. A midi, enfin, nous arrivâmes à Sainte-Croix, le
terme de notre course, bien fatigués, mais bien contents de l’avoir
faite.
(M . Dubouzet.)
Note 12, page 17.
Arrivés au pied du piton, nous gravissons, durant une dernière
heure, des cendres et des débris de pierres, et nous touchons enfin
au but désiré, le point le plus élevé de ce monstrueux volcan.
Le cratère fumant se présente à nos yeux comme une demi-
sphère creuse, soufreuse, couverte de débris de ponces et de
pierres, large d’environ 4 oo mètres et profond de 100 . Le thermomètre
qui est, à l’ombre, de 5° à dix heures du matin, s’est brisé,
placé sur le so l, dans un endroit qui laissait échapper des vapeurs
sulfureuses. Il y a sur les bords et dans le cratère une foule
de fumerolles qui distillent le soufre natif, qui forme la base du
sommet. La vitesse des vapeurs est assez grande pour faire- entendre
des détonations. La chaleur du sol est telle qu’en cer