« nous l’aperçûmes enfin cet Océan tant désiré, à qui
« son calme et sa beauté ont mérité, de notre part, le
« nom de Mer Pacifique. Alors quelques-uns de nos
« pilotes dirent que, puisque l’on avait trouvé le pas-
« sage, il fallait s’en retourner en Espagne, et revenir
« avec une flotte avitaillée de frais; mais le général
« poursuivit sa route et rejeta bien loin cet avis. »
Vers 1523, Garcie de Mendoce, gouverneur du Chili,
essaya de faire traverser le détroit de l’ouest à l’est,
chose qui avait été faussement jugée impraticable. Le
capitaine Ladrilleros, chargé de cette mission, partit
du Chili, pénétra dans l’Océan Atlantique; mais effrayé
par les gros temps qui régnaient alors, il revint
sur ses pas jusqu’au Chili. Dans le journal de Spil—
berg, on lit que les deux vaisseaux de Ladrilleros trouvèrent,
au sud du détroit, un passagie, par où il put
gagner la pleine mer en courant du nord au su d , et
l’on a supposé que ce passage devait être le canal
Saint-Isidore.
Au mois de juillet 1525, l’empereur Charles-Quinl
expédia, sous les ordres de Garcie de Loaise, pour
faire le tour du monde, une flotte de six vaisseaux. Le
vice-amiral était le fameux Sébastien Cano, qui avait
ramené le vaisseau de Magellan. Arrivé le 14- janvier
1526, dans la rivière Sainte-Croix, l’amiral envoya
Cano en avant pour reconnaître le détroit, et celui-ci
assailli par la tempête, près du cap Vierge, y perdit son
navire et une partie de l’équipage. Néanmoins la flotte
donna dans le détroit le 26 du mois, mais le vent
contraire la repoussa encore une fois près de la rivière
Sainte-Croix. Puis dans une nouvelle tentative, elle
fut entraînée au sud, et ce ne fut que le 8 avril qu’elle
put y en tre r, et alla mouiller dans une bonne baie
qu’on nomme Saint-Georges. On y vit des naturels
que les uns nommaient des géants, les autres des
Patagons. Enfin le 25 mai, l’escadre entra dans la Mer
du Sud. « Dans quelques endroits resserrés, dit la re-
« lation,les montagnes des deux rivages sont si hautes,
« qu’elles paraissent toucher le ciel. Le froid est ex -
« trême en ces endroits, où le soleil ne pénètre que
« rarement, et souvent pour un moment; on peut
« juger de ce que c’est dans la saison de l’hiver, quand
« les nuits y sont environ de dix-sept heures de durée.
« La neige, à force d’y vieillir, est devenue bleue. Mal-
« gré cela, on y trouve abondance de beaux arbres
« verts, de bonnes eaux, de bons poissons, sardines,
« anchois, merluches, tiburons, bonites, etc., des
« chèvres d’une grande espèce et des missilions;
« enfin de bons ports où l’on peut mouiller sur 14 et
« 15 brasses de fond. Les marées des deux mers y
« montent à la hauteur d’environ 50 lieues, se re -
« joignant vers le milieu du détroit où l’ebbe et le
« jusant sont très-forts. »
Simon de Alcazova ayant entrepris, en 1534, de
conduire une colonie au Pérou, entra dans le détroit
vers la fin de janvier de l’année suivante ; mais divers
contre-temps le forcèrent à retourner à l’île des Loups
Marins. Il envoya son lieutenant Rodrigue d e l’Isle, à
la tête de 200 hommes, pour faire une reconnaissance
dans l’intérieur; pendant ce temps, Alcazova fut lui