4838.
-Janvier. argent pour les officiers, et 8 en bronze pour les
élèves. Tous parurent sensibles à cette attention, et en
effet à cette époque, tous étaient encore animés d’un
bon esprit et pleins d’ardeur *.
Plus tard je distribuerai de ces médailles à tous les
officiers mariniers et marins dont j ’aurai été satisfait ;
car je trouve plus convenable de les laisser entre les
mains de personnes qui y attacheront du prix et seront
intéressées à les conserver, que d’en gratifier des individus
pour lesquels ce ne serait souvent qu’un joujou
insignifiant.
A sept heures du matin, je me suis embarqué dans
mon canot avec le jeune Le Breton que j’aime à mener
avec moi pour prendre le croquis des sites qui attirent
mon attention. Le capitaine Jacquinot s’embarque
dans le sien avec MM. Dubouzet et Le Guillou, puis
nous nous dirigeons de conserve vers la rivière de
Gennes. Nous eûmes quelque difficulté à franchir sa
barre, bien que nous y fussions déjà à mi-flot. Son
lit est étroit et souvent presque entravé par les
troncs d’arbres tombés en travers. Sur la droite, on
voit un wigwam (cabane en branchages) assez bien
conservé ; ce qui prouve que les Pécherais fréquentent
quelquefois ce point.
Le cours de la rivière se dirige assez uniformément
vers l’ouest, et je crois que sa profondeur ne varie
•guères qu’entre un et deux mètres. Les arbres qui
couvrent ses rives sont bien moins beaux' que ceux
* Notes 5 y et 58.
du Sedger. Après avoir navigué l’espace de deux
milles au plus, en heurtant souvent contre les troncs
d’arbres submergés, les matelots furent obligés de se
mettre à l’eau pour faire avancer le canot, et bientôt
il vint un détour où la rivière devenue trop basse et
trop rapide, nous força de nous arrêter.
Nous mîmes donc pied à te rre , et chacun de nous
s’éparpilla dans la forêt. Pour moi, suivi de mon
domestique, je passai mon temps à chasser et à
herboriser. Je reconnus avec surprise qu’il se trouvait
là plusieurs espèces de plantes qui n’étaient point
à Port-Famine , malgré sa proximité; il y avait
surtout une belle mousse rameuse au sommet, toute
nouvelle pour moi. Je recueillis deux ou trois coléoptères
; mais, en oiseaux, je n ’observai que quelques
merles et une grive que je tuai.
Le sol, dans ces forêts, est dégagé, ferme et facile à
parcourir. En outre, il y a de belles clairières, avec
des arbres semés çà et là , couvertes de belles pelouses
ou de tapis délicieux formés par des mousses
compactes. Un beau soleil animait toute cette nature
sauvage et pittoresque; la neige éblouissante des pics
voisins ressort comme des rubans d’argent au-dessus
des masses de verdure, et tout invite à la rêverie
et à la contemplation. Au pied d’un hêtre touffu-,
étendu sur un frais tapis de mousse, je restai quelque
temps absorbé dans mes pensées, qui se reportaient
touràtour de ma paisible cabane de Toulon aux glaces
que je devais bientôt affronter. Les regrets du passé,
les soucis de l’avenir et l’ennui du présent; ainsi