1er octobre.
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instruments sans courir grandement le risque de les
perdre.
Sur les huit heures du matin, je descendis à terre
derrière le môle. Là je trouvai M. Bretillard et don
Mathias, directeur de la santé. Je chargeai le premier
de s’occuper immédiatement des vivres dont je lui
donnai la note, et des préparatifs pour le transport des
officiers qui devaient exécuter l’ascension du pic.
M. Bretillard déclara qu’il était trop tard pour cette
course, et que la neige s’y opposerait ; mais don Ma-
thias affirma qu’il n’y en avait pas encore.
Une charmante goélette espagnole, nommée Norma,
est venue mouiller près de nous dans l’après-midi.
Longtemps je l’ai considérée avec un oeil de convoitise.
Combien un semblable navire eût pu me rendre
de services dans les glaces et surtout dans les labyrinthes
de coraux de l’Océanie ! Quel avantage de pouvoir
l’expédier en reconnaissance là où nos corvettes sont
déjà trop lourdes, trop peu maniables pour pouvoir
les y lancer sans de grands risques ! Avant de quitter
la France, j’avais souvent songé à tout cela. Mais cette
acquisition eût accru les dépenses de l’expédition;
j’avais peu de crédit et je devais déjà m’estimer heureux
d’avoir obtenu deux navires solides et bien
approvisionnés. Enfin cela eût encore reculé notre
départ déjà si tardif.
Dans la matinée, un canot de la santé est revenu le
long du bord pour nous questionner de nouveau-sur
l’état sanitaire à Toulon, et sur celui de nos équipages.
Des bruits bien étranges, des nouvelles sinistres causent
aux braves habitants de Ténérifïe une vive inquiétude
sur les provenances de la Méditerranée. Un
navire arrivé hier d’Espagne s’est plu à leur débiter
que quatre cents personnes mouraient chaque jour
à Toulon ; et ce qu’il y a de plus bizarre, c’est que
notre départ de Toulon est postérieur à celui de cet
oiseau de mauvais augure. Après avoir gravement
écouté les dépositions des capitaines et des médecins,
MM. de la santé se sont décidés à prendre nos patentes
et à nous promettre l’entrée libre pour demain à
midi.
Au moyen d’une ancre à jet mouillée au large, d’un
faux bras et du cabestan, nous avons profité d’un
calme plat pour faire virer la corvette sur elle-même et
lui faire présenter successivement le cap à toutes les
pointes du compas. L’expérience a réussi parfaitement
et l’on a employé le grand compas placé sur la tête du
cabestan, et destiné à servir aux observations subséquentes.
Le point qui a servi constamment de terme
de comparaison est la pointe S. E. de l’île de Ténériffe
éloignée de 22 milles environ. Les plus grandes différences
relatives aux divers caps n’ont été que de 30 à
40 minutes, c’est-à-dire inappréciables, puisque c’est
là précisément la limite de précision pour la lecture
des relèvements faits au compas.
Vers midi, le canot tant désiré de la santé revient
le long du bord. Après une nouvelle série de questions
encore plus longues que celles de la veille, au moment
où chacun n’attendait plus que le oui définitif, le directeur
'de la santé nous déclara avec une impertur•
1837.
Octobre.