ce départ. La chasse n’avait rien produit, les vivres étaient épuisés
j et ils allaient chercher meilleure fortune sur un autre point,
promettant toutefois de nous envoyer des guanaques le lendemain,
s’ils parvenaient à en attraper quelques-unes.
[M . Jacquinot. )
Note 82, page 164.
Partis d’un petit morne situé à la pointe S. 0 . de l’entree du
hâvre Peckett, nous parcourûmes vers le S. 0 . une distance d’environ
quinze milles sans avoir trouvé le bras de mer en question.
Une pluie continuelle, un vent froid , l’impossibilité d’allumer
un feu et de bivouaquer, puis enfin la nécessité de rallier le bord
avant le 8 au matin, nous obligèrent à renoncer à cette recherche.
Le lieu où nous nous arrêtâmes semblait être le point culminant
d e s terres environnantes. A partir de là, les ondulations du terrain
s’étendaient à toute vue vers le S. O., où nous aurions pu voir la
mer à neuf milles de distance, si elle eût existé réellement. On
peut donc affirmer que dans la direction du S. O., l’isthme de
Brunswich doit avoir plus de huit lieues de largeur, au lieu de
trois lieues que Ring lui a donnée. Peut-être l’hydrographe anglais
a-t-il pris pour un bras demer une longue suite de bras que
nous avons cotoyés et laissés enfin à notre gauche.
Le terrain que nous avons parcouru est d’une uniformité monotone.
C’est une vaste plaine, Ou plutôt une suite de plaines entourées
de petits bourrelets de terre dont la hauteur n’excède pas
4 o à 5o pieds. Ces massifs dont le talus est souvent d’une grande
régularité, paraissent jettes au hasard dans toutes les directions,
sans qu’il soit possible d’estimer le cours des eaux qui semble les
avoir formés. Le sol, dénaturé tourbeuse, e st criblé d’une multitude
de terriers assez semblables à ceux de nos taupes. Des légions
de rats habitent ces demeures souterraines j vivant peut-être de
la même racine dont les Patagons se nourrissent. Ces rats de la
plus grande espèce, ont une assez jolie fourrure, noire sur le
dos et blanche sous le ventre. Les Patagons en fabriquent quelques
manteaux. Je n’ai vu dans les steppes désertes que des joncs, des
herbes et quelques plantes épineuses. Dans ces tristes solitudes,
l’oeil n’est jamais réjoui par la vue d’un seul arbre ; car on ne
saurait appeler de ce nom une sorte de groseiller sauvage et un
autre arbriseau à feuilles cendrées dont le sol est couvert. Les
replis du terrain enferment d’assez grands lacs où des vols innombrables
d’oies et de canards peuvent braver les flèches inoffensives
des indigènes. Les parties marécageuses servent de refuge
aux bécassines. Les guanacos se tiennent de préférence sur les
crêtes des monticules d’où ils peuvent apercevoir à de grandes
distances la troupe des chasseurs patagons. Toujours alertes et
attentifs au moindre b ru it, ces timides animaux n’ont, pour se
soustraire à leurs ennemis, qu’une extrême vigilance, et une vitesse
qui ne le cède qu’à celle des chevaux. Dans notre course,
nous aperçûmes deux guanacos qui, le cou tendu, se tenaient
déjà sur leurs gardes ; car ils décampèrent avant que nous les
eussions approchés à plus d’un demi-mille.
Ayant fait halte pour déjeûner au milieu d’une plaine couverte
d’herbes sèches , nous vîmes partir très-près de nous
une petite autruche qui venait d’abandonner son nid où nous
recueillîmes dix-sept oeufs encore chauds. Un peu plus loin une
très-belle autruche se présenta tout à coup devant nous ; elle
semblait marcher difficilement. Mais nos armes étaient en très-
mauvais é ta t, et nous eûmes le regret de les manquer. Nous ne
fûmes pas plus heureux sur deux autres de ces oiseaux qui nous
échappèrent encore. A la vérité, je ne sais trop comment il eût
été possible de les porter à bord, par le mauvais temps qui nous
a poursuivis sans relâche. L’autruche de Patagonie a une taille
au moins égale à celle d ’Afrique,$ mai? son plumage lui est très-
inférieur. Il est d’un gris pommelé et manque de ce velquté qu’011
remarque sur les plumes d’Egypte ou de Maroc.