358 H i s t o i r e N a t u r e l z e
voudrait chercher un abri fur de grands arbres; il fe
roule, avec promptitude, jufqu’à l’extrémité des cimes
les plus hautes (a); auflî v it - il fouvent dans les forêts.
„ l’efpèce du Devin, à laquelle on a donné ce nom en plufieufs
j) contrées) , qui montent lur les arbres pour découvrir leur proie ,
jj '& qui s'élançant deffus quand elle s’approche, la ferrent avec tant
jj de force, quelle ne peut fe remuer , & la dévorent toute vivante :
jj mais lorfqu’ils ont avalé des bêtes entières , ils deviennent li pefaiis ,
», qu’ils ne peuvent plus fe traîner___Plufieurs de ces monftrueux
jj Reptiles vivent de poilfon , & le Père de Montoya raconte qu’il
jj vit lui jour une Couleuvre dont la tête étoit de la grofleur dun
u veau , & qui pêchoit fur le bord d’une rivière ; elle commençoit
jj par jeter de fa gueule beaucoup d’écume dans l’eau, enfuite y
jj plongeant la tête , & demeurant quelque temps immobile, elle
jj ouvroit tout-d’un-coup la gueule pour avaler quantité de poiflons
jj que l’écume fembloit attirer. Une autrefois le même Millionnaire
jj vit un Indien de la plus grande taille, qu i, étant dans l’eau jufqu’à
jj la ceinture, occupé de la pêche , fut englouti par une Couleuvre
jj q u i, le lendemain, le rejeta tout entier, jj Hißoire générale des
Voyages , édit, in-12 , tom. 5$ , pag. 42.0 & fuiv.
(a) « M. Salmon nous apprend que, dans Fille de Macalfar, il
jj y a des linges, suffi féroces que les chats fauvâgés, qui attaquent
jj les voyageurs, fur-tout les femmes , & les mangent après les avoir
jj mis en pièces ; de forte qu’on eft obligé, pour s’en défendre,
jj d’aller toujours armé. II ajoute que ces linges ne craignent d’autres
jj bêtes que les Serpens, qui les pourfuivent avec une vîtelfe extraor-
jj dinaire & vont les chercher jufques fur les arbres, ce qui les oblige
jj d’aller en troupes pour s’en garantir, ce qui n’empêché pas qu’lis
jj né les attaquent & ne les avalent tout en v ie , lorfqu’ils peuvent
jj les attraper, jj Hiß. natur. de ÏOrenoque, vol. g , pag. y8. Les
Enveloppant les tiges dans les divers replis de fou
corps, il fe fixe fur les arbres à différentes hauteurs,
& y demeure fouvent long - temps en embufcade,
attendant patiemment le paffage de fa proie. Lorfque,
pour l’atteindre ou pour fauter fur un arbre voifin, il
a une trop grande diftance à franchir, il entortille fa
queue autour d’une branché, & fufpendant fon corps
alongé à cette efpèce d’anneau, fe balançant & tout
d’un coup , s’élançant avec force, il fe jette comme
un trait fur fa viélime , ou contrel’arbre auquel il
s’attacher.
Il fe retire auffi quelquefois dans les cavernes des
montagnes, & dans d’autres antres profonds où il a
moins à craindre les attaques des ennemis,. & où il
cherche un afyle contre les températures froides, les
pluies trop abondantes, & les autres accidens de l’atmof-
phère qui lui font contraires.
Il eft connu fous le nom trivial de grande Couleuvre,
fur les rivages noyés de la Guyane : il y parvient
communément à la grandeur de trente pieds, & même,
dans certains endroits, à celle de quarante. Comme
le nom qu’il y porte y eft donné à prefque tous les
Serpens qui joignent une grande force à une longueur
confidérable, & qui, en même-temps, n’ont point
récits des autres Voyageurs nous portent à croire que l’elpèce de
Serpent dont a parlé M. Salmon eft celle du Devin.
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