
6 4 H i s t o i r e N a t v r e l l e
ceux même qui ne recherchent qu’avec peu d’empref-
fement les détails de l’Hiftoire Naturelle. C’eft
M. Haffelquift qui a fait connoître cette vipère ,
qu’il a décrite, dans' fon voyage en Egypte ; elle a
la tête relevée en bofle des deux côtés, derrière les
yeux ; fa longueur eft peu confidérable ; les écailles
qui recouvrent le deflus dé fon corps, font très-
petites ; fon dos eft d’un blanc livide , & préfente des
taches roufles ; les grandes plaques qui revêtent le
deflous de fon corps , font au nombre de cent dix-
huit , 6c le deflous de la queue eft garni de vingt-deux
paires de petites plaques.
Les Anciens ont écrit que fon poifon, quoique
mortel, ne caufoit aucune douleur 5 que les forcés
de ceux quelle avoit mordus s’afîbibliflbient infenfi-
blement , qu ils tomboient dans une douce langueur
& dans une forte d’agréable repos , auquel fuccédoit
un iommeil tranquille qui fe terminoit par la mort ;
& voilà pourquoi on a cru que la Reine d’Egypte ,
ne pouvant plus fupporter la vie après la mort d’Antoine
6c la viétoire d’Augufte, avoit préféré de mourir
par l’effet du venin de cette vipère. Quoi qu’il en
foit des fuites plus ou moins douloureufes de fa mord
r e , il paroît que fon poifon eft des plus aétifs, C ’eft
ce Serpent dont on emploie diverfes préparations en
Egypte, comme nous employons en Europe celles de
la vipère commune ; c’êft celui qu’on y vend dans
les boutiques,
les boutiques, 6c dont on fe fert pour les remèdes connus
fous les noms de Jel.de vipère , de chair de vipère dejfichéè,
6cc. Suivant M. Haffelquift, on envoie tous les ans,
a Venife, une grande quantité de vipères Egyptiennes,
pour la compolition de la thériaque ; 6c dès le
temps de Lucain, on en faifoit venir à Rome, pour
la préparation du même remède. C’eft cet ufage ,
continue jufqu a nos jours, qui nous a fait regarder
la vipère d’Egypte comme celle dont' Cléopâtre
s’étoit ferrie 5 toutes fes descriptions font d’ailleurs
très - conformes a celle que nous trouvons de
l’Afpic de Cléopâtre , dans les anciens Auteurs, 6c
particulièrement dans Lucain \ & voilà pourquoi
nous avons préféré , à ce fujel , lopin ion de JM. Laurent
(a) , 6c d’autres Nâturaliftés, à celle de M. Linné,
qui a cru que le Serpent dont le poifon a donné la mort
à la Reine d’Egypte , étoit celui qu’il a nommé
l'Ammodyte , 6c dont nous allons nous occuper (b) .
Il paroît que c’eft aufli à cette vipère qu’il faut
rapporter ce que Pline a dit de l’Afpic ( c ) , 6c la
(a) Voyez l’endroit déjà cité.
(b) Aménités académiques , Stockholm, 1763 , vol. G , p. az o.
( c) P lin e, Liv. 8.