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leur préfence à leurs viélimes, s’élancent fur elles par
des fauts aulli rapides qu’inattendus, ne parviennent à
les vaincre que par leurs poifons mortels, & n’emploient
que cette arme traîtrefle qui pénètre comme un trait
invifible, dont & la valeur ni la pui(Tance ne peuvent
fe garantir. Nous allons parler maintenant d’un genre
plus noble ; nous allons traiter des Boa , des plus
grands & des plus forts des Serpens, de ceux.qui, ne
contenant aucun venin , n’attaquent que par befoin ,
me combattent qu’avec audace, ne domptent que par
leur puiflance ; & contre lefquels on peut oppofer les
armes aux armes, le courage au courage, la force à
la force, fans craindre de recevoir , par une piqûre
infenfible, une mort auffi cruelle qu’imprévue.
Parmi ces premières efpèces, parmi ce genre diftingué
dans Tordre des Serpens, le Devin occupe la première
place. La Nature l’en a fait Roi par la fupériorité des
dons quelle lui a prodigués. Elle lui a accordé la
beauté, la grandeur, l’agilité, la force, l’induftrie
Xaxathua & Boiguacu. M . V a lm on t de Bom are.
Serpens Peregrinus. Car. C lu fiu s , exoticorum , lib . 5 , p . 1 1 3 t
ed. 1603.
Am phitheatrum Z o otom icum M ich . B e rn . V a len tin , tab. 8 3 , fig . S.
Boiguacu. P ijb n , de m edicina B r a filie n fi, lib . 3 , f o l . 4 1 .
Boiguacu. Georg. M arcgrayi , h ifi. return n atum lium 'B r a filie i,
lib . 8 , cap. 1 3 , f o l. z i g .
D E S iS E S P E N S. 2 A l
elle lui a en quelque forte tout donné , Hors ce
funefte poifon départi à certaines efpèces de Serpens,
prefque toujours aux plus petites, & qui a fait regarder
1 ordre entier de ces animanx comme des objets d’une
grande terreur.
Le Devin efl: donc parmi les Serpens, . comme
l’Eléphant ou le Lion parmi les Quadrupèdes. Il furpalîè
les animaux de fon ordre, par fa grandeur comme le
premier, & par fa force comme le fécond; il parvient
communément à la longueur de plus de vingt, pieds;
& , en réunifiant les témoignages des Voyageurs, il
paroit que c’eft à cette efpèce qu’il faut rapporter les
individus de quarante ou cinquante pieds de long, qui
habitent, fuivant ces mêmes Voyageurs, les déferts
brûlans où l’homme ne pénètre qu’avec peine (a).
{a ) Gronovitfs avoit dans fon Cabinet, une dépouille d’un Serpent
D iv in qui avoit lîx pieds de longueur ; & il a écrit en avoir vu dans
plufieurs Cabinets, dont la longueur étoit de vingt pieds. P. 70
Mufioeum G ro n ov ii , L ey d e , 1 7 3 4 , in -fo lio . Sans parler du fameux
Serpent de Norvège, q u i, fuivant Olaiis Magnus ( tiv . a j , chap. 4 3 ) ,
avoit plus de deux Cens pieds de longueur avec une épailîeur de vingt
pieds, & dont il faut ranger l'hiftoire parmi les fables, l’on peut
citer, entre plufieurs témoignages, celui de George Anderfen , qui,
dans le fixième chapitre de fon Voyage en O r ien t, dit q u e , dans
l’Ifle de Java, il y a des Serpens alTez grands pour avaler des hommes
entiers. Le Voyageur Iverfen tua lui-même un Serpent de vingt-trois
pieds de longueur; voyez fon Voyage dans les contrées orientales