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la couleur de cette efpèce n’eft pas confiante, & que
la moitié à-peu-près des individus qui la compolenf :$
préfentent une couleur différente de la jaune. Nous
avons préféré de tirer fon nom de la conformation
particulière & très-conftante de fa tête.
La vipère Fer-de-lance a cette partie plus groffe
que le corps, & remarquable par un efpace prefque
triangulaire , dont les trois angles font occupés par
le mufeau & les deux yeux. Cet efpace , relevé par
fes bords antérieurs , repréfente un fer de lance large
à fa bafe & un peu arrondi à fon fommet.
Les trous des narines font très-près du bout du mufeau
; les yeux font gros , ovales, & placés obliquement.
Lorfque le Fer-de-lance a acquis une certaine
groffeur, on remarque de chaque côté de fa tête ,
entre fes narines & fes yeux , une ouverture qui eft
très-fenfible dans les individus confervés au Cabinet du
R o i, & que l’on a regardée comme les trous auditifs
de ce Serpent (a). Chacun de ces trous eft , en effet,
l’extrémité d’un petit canal qui paffe au-deffous de
l’oe il, & qui nous a paru aboutir à l’organe de l’ouïe.
Comme nous n’avons examiné que des Fers-de-lancé
confervés depuis long-temps dans l’efprit-de-vin , nous
( a ) Mémoires fur la Vipère jaune de la Martinique , publié da'ns
les Nouvelles de la République des Lettres & des Arts.
n’avons pu nous affurer de ce fa it , qu’il feroit d’autant
plus intéreffant de vérifier , que l’on n’a encore
obfervé , dans aucune autre efpèce de Serpent , des
ouvertures extérieures pour les oreilles. S’il étoit bien
conftaté , on ne pourrait plus douter que le Serpent
Fer - de - lance n’eût des ouvertures extérieures pour
1 organe de l’ouïe, de même que les lézards, avec
cette différence cependant que, dans ces derniers animaux
, ces ouvertures font fituées derrière les yeux ,
ainfi que dans les oifeaux & les quadrupèdes vivipares
, au lieu que le Fer-de-lance les aurait entre
les yeux & le mufeau.
De chaque côté de la mâchoire fupérieure , on
apperçoit un & quelquefois deux ou même trois crochets
, dont l’animal fe fert pour faire les bleflures
dans lefquelles il répand fon venin. Ces crochets ,
d’une fubftance très-dure, de la forme d’un hameçon,
&• communément de la groffeur d’une forte alêne,
font mobiles, creux depuis leur racine jufqu’à leur
bord convexe , qui préfente une petite fente , &
revêtus d’une membrane qui fe retire & les laiffe paraître
lorfque l’animal ouvre la gueule & les redreffe
pour s’en fervir. Leur racine eft couverte par un petit
fa c d’une membrane très-forte qui renferme le venin
de l’animal, & qui , fuivant l’Auteur d’un Mémoire
que nous yenons de citer , peut contenir une demi.-
cuillerée à café de liqueur. Au refte, ce fac ne nous a.
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