qu’elle ne contient aucun fel proprement dit, puifque
lorfqu elle fe deffèche, elle ne préfente pas un commencement
de cryftallifation , comme les fels dont
l’eau furabondante s’évapore, mais fe gerce , fe retire,
fe fend, fe divife en très-petites portions, de manière
à repréfenter , par toutes fes fentes très-déliées &
très-multipliées, une efpèce de réfeau que l’on a
comparé à une toile d’araignée (a).
Quelque fubtil que foit le poifon de la vipère , il
paroît qu’il n’a point d’effet fur les animaux qui n’ont
pas de fang ; il parôît auffi qu’il ne peut pas donner
la mort aux vipères elles-mêmes ; & à l’égard des
animaux à lang chaud , la morfure de la vipère leur
eft d’autant moins funelte que leur groffeur eft plus
confidérable, de telle forte qu’on peut préfumer qu’il
n’eft pas toujours mortel pour l’homme ni pour les
grands quadrupèdes ou oifeaux L’expérience a prouvé
auffi qu’il eft d’autant plus dangereux qu’il a été
diftillé en plus grande quantité dans les plaies par
des morfures répétées. Le poifon de la vipère eft donc
funefte en raifon de fa quantité , de la chaleur du
fang & de la petiteffe de l’animal qui eft mordu ; ne
doit-il pas auffi être plus ou moins mortel, fuivant
la chaleur de la faifon , la température du climat &
(a) M. îAbbé Fontana , dans le mime Ouvrage.
l’état de la vipère , plus ou moins irritée , plus ou
moins animée, plus ou moins preffée par la faim , &c. ?
Et voilà pourquoi Pline avoit peut-être raifon de dire
que la vipère , ainfi que les autres Serpens vénimeux,
ne renfermoit point de poifon pendant le temps de
fon engourdiffemeht (a). Au refte, M. l’Abbé Fontana,
l’un des meilleurs Phyficiens & Naturaliftes de l’Europe
, penfe que le venin de la vipère tue en détruff
fant l’irritabilité des nerfs , de même que plufieurs
autres poifons tirés du règne animal ou du règne
végétal (b) ; & il a auffi fait voit' que cette liqueur
jaune & vénéneufe étoit un poifon très-dangereux
lorfqu’elle étoit prife intérieurement, & que Rédi ,
ainfi que d’autres Obfervateurs , n’ont écrit le contraire
que parce qu’on avoit avalé de ce poifon en
trop petite quantité pour qu’il pût être très-nuifible (c).
On a fait depuis long-temps beaucoup de recherches
relativement aux moyens de prévenir les fuites
funeftes de la morfurte des vipères ; mais M. l’Abbé
Fontana f que nous venons de c ite r , s’eft occupé de
cet important objet plus qu’aucun autre Phyficien :
perfonne n’a eu , plus que lu i , la patience & le
(a) Pline , liv. 8.
{b) Traité des Poifons. Florence , r jS i.
(c) Ibid, y oh s ., p. 308.