trouvé ces deux nombres fur un individu dont la longueur
totale étoit d’un pied deux pouces deux lignes,
& la longueur de la queue de deux pouces une ligne.
Nous n’avons compté que deux cens vingt-cinq grandes
plaques , & cinquante - neuf paires de petites ,
fur un autre individu , qui cependant étoit plus grand
& avoit deux pieds fix lignes de longueur totale.
Lorfque le Fer-de-lance fe jette fur l’animal qu’il
veut naordre , il fe replie en fpirale , & , fe fervant
de fa queue comme d’un point d’appui, il s’élance
avec la vîtelfe d’une flèche ; mais l’efpace qu’il parcourt
eft ordinairement peu étendu. Ne jouiffant pas
de l’agilité des autres Serpens, prefque toujours affoupi,
fur-tout lorfque la température devient un peu fraîche,
il fe tient caché fous des tas de feuilles, dans des
troncs d’arbres pourris, <5t même dans des trous creufés
en terre. Il eft très-rare qu’il pénètre dans les maifons
de la campagne, & on ne le trouve jamais dans celles
des Villes ; mais il fe retire fouvent dans les' plantations
de cannes à fuçre , où il eft attiré par les rats ,!
dont il fe nourrit. II ne blefte ordinairement que lorf-
qu’on le touche & qu’on l’irrite, mais il ne mord
jamais qu’avec une forte de rage. On peut être averti
de fon approche par l’odeur fétide qu’il répand , &
par le cri de certains oifeaux, tels que la gorge-blanche
, qui, troublés apparemment par .fa reflemblance
avec les Serpens qui les pourfuivent fur les arbres '&
les y dévorent, fe ràftemblent & voltigent fans cefle
autour de lui. Lorfqu’on eft furpris par ce Serpent >
on peut lui préfenter une branche d’arbre, un paquet
de feuilles, ou tout autre objet qui captive fon attem
tion & donne le temps de s’armer ; un coup fuffit
quelquefois pour lui donner la mort. Quand on lui a
coupé la tête, le corps conferve, pendant quelque
temps, un mouvement vermiculaire.
C’eft dans le mois de Mars ou d’Avril que ce dangereux
Reptile s’accouple avec fa femelle ; ils s’unifi-
fent fi intimement, & fe ferrent dans un fi grand
nombre de contours, qu’ils repréfentent., fuivant un
bon O b le rv a teu rd eu x grofles cordes trelfées enfem-
ble (a). Ils demeurent ainfi réunis pendant plufieurs
jours, & on doit éviter avec un très-grand foin, de
les troubler dans ce temps d’amour & de jouifl’ance ,
où de nouvelles forces rendent leurs mouvemens plus
prompts & leur venin plus aélif. La mère porte fes
petits pendant plus de-fix mois, fuivant l’Auteur du
Mémoire déjà cité , & ce temps, beaucoup plus long
que celui de la geftation de la vipère commune, qui
n’eft que de deux ou trois mois, feroit cependant
(a) Lettre fur la vipère jaune de la Martinique, par M. Bonodet
deFoix, Avocat au Confeil Supérieur dé la Martinique, inférée dans
les Nouvelles de la République des Lettres &des Arts, année 1786.