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des oeufs de p ie s , font collés enfemble par une matière
gluante en forme de grappe ; elle a par-là un
nouveau rapport avec les poiffons & certains quadrupèdes
ovipares , tels que les crapauds , les grenouilles
, &c. dont les oeufs font de même collés
enfemble & réunis de diverfes manières.
Les oeufs de la Couleuvre à collier , dépofés dans
des fumiers , ont donné lieu à une fable à laquelle
on a cru pendant long-temps ; on a prétendu qu’ils
avoient été pondus par des coqs, & comme on en a
vu fortir de petits Serpenteaux, on a ajouté que les
oeufs de coq renfermoient toujours un Serpent, que
le coque les couvoit point, mais que lorfqu’ils étoient
placés dans un endroit chaud, comme parmi des végétaux
en putréfaction , ils produifpient toujours des
Serpens,
On alfure qu’il eft aifé de diltinguer les oeufs qui
ont été fécondés , d’avec ceux qui ne le font pas, &
qu’on appelle d'es oeufs clairs, en les mettant fur l’eau;
les, oeufs clairs font les feuls qui furnagent.
La coque eft compofée d’une membrane mince t
mais çompaéle & d’un tiftu ferré. Le petit Serpent y
eft roulé fur lui-même au milieu -d’une matière qui
reffemble a du blanc d’oeuf de poule ; on ÿ remarque
un placenta ; & le cordon ombilical eft attaché au
ventre un peu au-deflus de l’anus. La chaleur feule de
J’atmofphère, & celle des matières végétales pourries,
font
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font éclore ces oeufs. Peut-être dans des contrées plus
voifines de la Zone Torride que celles où ils ont été
obfervés, l’ardeur du foleil fuffiroit pour faire fortir
les .petits Serpens de leur coque. Nous avons vu , en
effet, dans l’Hiftoire des Quadrupèdes ovipares, les
crocodiles dépofer leurs oeufs fur le fable dans les
contrées brûlantes de l’Afrique ; mais fur les plages plus
humides & moins chaudes de l’Amérique méridionale,
ils les placent/au milieu d’un tas de matières végétales ,
dont la fermentation favorife l’accroiffement du foetus
& la fortie de l’oeuf.
Ces oeufs de Couleuvre à collier font ordinairement
au nombre de dix-huit ou vingt (a) ; auffi l’efpèce du
Serpent à collier feroit-elle beaucoup plus nombreufe
quelle ne l’e ft , s’il ne devenoit pas la proie de plu-
fieurs ennemis même très-foibles, dans le temps qu’il
eft encore jeune & fans force pour fe défendre ; les
pies , les méfanges , les moineaux le dévorent, & les
grenouilles mêmes s’en nourriflent lorfqu elles peuvent
le faifir fur le bord des marais quelles habitent (b~).
( a) Quelquefois ce nombre n’eft que de quatorze ou quinze.
Gefner a écrit qu’on lui apporta , vers la fin du mois de Juin, une
femelle de l’efpèce dont il eft queftion dans cet article, & que , deux
jours après , elle pondit quatorze oeufs.
( b ) Lettre déjà citée de M . de Sept-Fontaine s.
Serpens, Tome II. U