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aies & l’éclat brillant de l’or refplendiffent fur les
écailles du Boiga , ainfi que fur les plumes de l’oifeau-
mouche ; & comme f i, en embelliffiant ces deux êtres,
la Nature avoit voulu donner à l’art un modèle parfait
du plus bel aflbrtiment de couleurs , les teintes les
plus brunes, répandues fur l’un & fur 1 autre, au milieu
des nuances les plus claires, font ménagées de
manière à faire refîortir , par un heureux contrafte ,
les couleurs éclatantes dont ils brillent.
La tête du Boiga, affez greffe en proportion de fon
corps, eft recouverte de neuf grandes écailles difpofées
fur quatre rangs. Ces neuf plaques , ainfi que les autres
écailles qui garniffent le defïus de la tete de ce Serpent
, font d’un bleu fonce & comme foyeux ; une
bande blanche qui règne le long de la mâchoire fupe-
rieure ^relève cette efpace azuré, au milieu duquel
on voit briller les yeux du Boiga , & qui reffort d autant
plus, qu’une petite bande noire s’étend entre le
bleu & la bordure blanche. Tout le defïus du corps,
jufqu’à l’extrémité de la queue , eft egalement d un
bleu variant par reflets, & preferitant meme , a certaines
expofitions, le vert de 1 emeraude. Sur ce beau
fond de faphir règne une efpèce de raie ou de chaînette
que l’on croiroit dorée par l a r t , & qui setend
jufqu’au bout de la queue ; & non-feulement cette
efpèce de riche broderie préfente l’éclat métallique de
l’or, lorfque l’animal eft encore en v ie , mais-même
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Iorfqu il a été confervé pendant long-temps dans l’efi-
prit-de-vin, on croiroit que les écailles, qui compofent
cette petite chaîne , font autant de feuilles d’or appliquées
fur la peau du Serpent. Tout le deffous du corps
& de la tête eft d’un blanc argentin , féparé des couleurs
bleues du dos par deux autres petites chaînes
dorees q u i, de chaque côté , parcourent toute la longueur
du corps.
Mais l’on n’auroit encore qu’une idée imparfaite de
la beaute du Boiga , fi l’on fe repréfentoit uniquement
cet azur & ce blanc agréablement contraftés & relevés
par ces trois broderies dorées ; il faut fe peindre tous
les reflets du defïus & du deffous du corps, &. les différentes
teintes de couleur d’argent, de jaune , de rouge & de
noir , qu ils produifent. Le bleu & le blanc, au travers
defquels il femble qu’on apperçoit ces teintes merveil-
leufement fondues, mêlent encore la douceur de leurs
nuances a la vivacité de ces divers reflets, de telle
forte que , lorfque le Boiga fe meut, l’on croiroit voir
briller au-deifous d’un cryftal tranfparent & quelquefois
bleuâtre, une longue chaîne de diamans, d’émeraudes,
de topazes, de faphirs & de rubis. Et il eft
a remarquer que c’eft dans les belles & brûlantes campagnes
de l’Inde, où les cryftaux & les pierres dures
préfentent les nuances les plus vives , que la Nature
s eft plue, pour ainfi dire, à réunir ainfi fur la robe
du Boiga , que image fidèle de ces riches ornemens,
Serpens , Xome 11.