atfq H i s t o i r s N ^ t i t r e z z e
fente des étoffes de foie, des bijoux, les mets les plus
délicats du pays , &* même des troupeaux ; auffi les
Prêtres qui le fervent, jouiffent - ils d’un revenu
confidérable , pofsèdent - ils des terres immenfes f
& commandent - ils à un grand nombre d’ef-
claves.
Afin que rien ne manque à leurs plaifirs, ils forcent
les Prêtreffes à parcourir, chaque année , & vers le
temps où le maïs commence à verdir, la ville de Juida ,
& les bourgades voifines. Armées d’une grofle. maffue,
& fécondées par les Prêtres, elles affommeroient
fans pitié ceux qui oferoient leur réfifter ; elles forcent
les Négreffes les plus jolies à les fuivre dans le
Temple ; &. le poids de la crédulité fuperftitieufe
pèfe fi fort fur la tête des Nègres, qu’ils'croient
qu’elles vont être honorées des approches du Serpent
protecteur, & que c’elt à fon amour quelles vont
être livrées. Ils reçoivent avec refpeét cette faveur
fignalée & divine. On commence par inftruire les
jeunes filles à chanter des hymnes, & à danfer en
l’honneur du Serpent \ & lorfqu’elles font près du
temps où elles doivent être admifes auprès de la prétendue
Divinité, on les foumet à une cérémonie dou-
loureufe &. barbare, car la cruauté naît prefque toujours
de la fuperftition. On leur imprime fur la
peau , dans toutes les parties du corps , & avec
des poinçons de fer , des figures de fleurs, d’animaux
, & fur-tout de Serpens ; lès Prêtreffes les
confacrent ainfi au fervice de leur Dieu ; &T c’eft
en vain que leurs malheureufes viélimes jettent les
cris les plus plaintifs que leur arrache le tourment
qu’elles-éprouvent ; rien n’arrête leur zèle inhumain.
Lorfque la peau de ces infortunées eft guérie, elle
reffemble j dit-on , à un fatin noir à fleurs , &
elle les rend à jamais l’objet de la vénération
des Nègres.
Le moment où le Serpent doit recevoir la Négreffe
favorite arrive enfin; on la fait defcendre dans un
fouterrain obfcur, pendant que les Prêtreffes & les
autres jeunes filles célèbrent fa defiinée par des danfes
& des chants qu’elles accompagnent du bruit de plu-
fieurs inftrumens retentiffans. Lorfque la jeune Né-
grefle fort de l’antre fa*cré, elle reçoit le titre de
Femme du Serpent; elle ne devient pas moins'la femme
du Nègre qui parvient à lui plaire, mais auquel elle
infpire à jamais la foumiffion la plus aveugle, ainfi
que le plus grand refpeél.
Si quelqu’une des femmes du Serpent trahît
le fecret des plaifirs des Prêtres, en révélant les
myftères du fouterrain, elle efi: auflitôt enlevée &
mife à mort, ôc. l’on croit que le grand Serpent eft
venu lui-même exercer fa vengeance", en l’emportant
pour la faire brûler. Mais, arrêtons-nous ; l’hiftoire de
la fuperftition n’eft point celle de la nature. Elle eft