8 o H i s t o i r e N a t u r e l l e
Bélon affure que les petit Céraftes éclofent dans
le ventre de leur mère, ainfi que ceux de notre vipère
commune (a) ; mais nous croyons devoir citer un
fait qui paroît contredire cette affertion, & que Gefner
rapporte dans fon Livre de la nature des Serpens ,
d’après un de fes Correfpondans qui en a voit été témoin
à Venife (b). Un Noble Vénitien conferva pendant
quelque-temps, & auprès du feu , trois Serpens qu’on
lui avoit apportés du pays où l’on trouve les Céraftes;
l’un femelle , & trois fois plus grand que les autres,
avoit trois pieds de long , prefque la grofl'eur du
bras, la tête comprimée & large de deux doigts ,
l’iris noir , les écailles du dos cendrées & noirâtres
dans leur partie fupérieure , la queue un peu roufle
& terminée en pointe, &. une corne de fubftance
écailleufe au-deflùs de chaque oeil. Gefner le regarda
comme de l’efpèce des Céraftes , dont il nous paroît,
jj bouteille, un peu de fable fin , dans lequel elles fe louvoient ;
jj lorfque je les vis, elles vendent de changer de peau, & paroiflbient
jj auflï vigoureufes & auilî vives que fi elles avaient été prifes tout
jj nouvellement, jj Schay>. Voyage dans plujïeurs Provinces de la
Barbarie fi” du Levant, tom. s ., chap.
( a) Voyez Bélon & Ra y , à l'endroit déjà cité.
(b) Gefner. fol. $8.
dn effet,
d e s S e r p e n s . 81
en effet, avoir eu les principaux caractères ; il pondit
dans le fable quatre ou cinq oeufs à-peu-près de la
groffeur de ceux de pigeon. Les rapports de conformation
, de qualité vénéneufe & d’habitudes qui lient
le Cérafte avec la vipère commune , ainfi qu’avec un
grand nombre d’autres vipères dont la manière de venir
au jour eft bien connue , nous feroient adopter de préférence
l’opinion fondée fur l’autorité de Bélon , • qui
a beaucoup voyagé dans le pays habité par les Céraftes ;
mais comme il pourroit fe faire que les deux manières
de venir à la lumière fuffent réunies dans quelques
efpèces de Serpens, ainfi qu’elles le font dans quelques
efpèces de quadrupèdes ovipares, & qu’il feroit bon de
bien déterminer fi tous les animaux armés de crochets
venimeux, éclofent dans le ventre de leur mère, &
même font les feuls qui ne pondent pas , nous invitons
les Voyageurs qui pourront obferver fans danger les
Céraftes, â s’affurer de la manière dont naiffent leurs
petits.
Hérodote a parlé de Serpens confacrés par les habi-
tans de Thèbes à Jupiter, ou pour mieux dire, à la
Divinité Egyptienne qui répondoit au Jupiter des Grecs;
on les enterroit, après leur mort, dans le Temple de
ce Dieu : & , fuivant le Père de l’Hiftoire , ils avoient
deux cornes, mais ne faifoient aucun mal à perfonne.
Si Hérodote n’a point été trompé, on devroit les regarder
comme d’une efpèce différente de celle du Cérafte ;
Serpens, Tome IJ. I