pour ainfi dire , dans un intérieur peu fufeeptible de
réfiftance : toutes ces variations auront influé fur leurs
habitudes, & ne pouvant pas oppofer de grandes forces
aux accidens de toute efpèce ,- non plus qu’aux vicif-
fitudes de l’atmofphère , leurs moeurs auront changé
de - plus en plus, & tout aura fi fort varie dans ces
petits animaux , que bientôt les diverfes races forties
d’une fouche commune , n’auront pas préfenté aflez
de reffemblances pour conftituer une même efpèce.
Les grands Serpens, au contraire, peuvent bien offrir,
fous les divers climats, quelques différences de couleurs
ou d’habitudes qui marquent l’influence de la
terre & de l’air , à laquelle aucun animal ne peut fa
fouftraire ; mais plus indépendans des circonftances de
lieux & de tems, plus conlfans dans leurs habitudes,
plus inaltérables dans leurs proportions ils doivent
préfenter plus fouvent, dans les pays les plus éloignés,
le nombre & la nature de rapports qui confti-
tuent l’identité de l’efpèce. Ce feront quelques-uns de
ces grands Serpens , nageant à la furface de la mer,
fuyant fur les eaux un ennemi trop à craindre pour
eux , ou jetés au loin par les vagues .agitées y, elevant
avec fierté leur tête au-deffus des flots , &. fe recourbant
avec agilité en replis tortueux , qui auront fait
dire du tems de Pline , ainfi que le rapporte ce grand
Naturalifte, qu’on avoit vu des migrations par m e r ,
de dragons ©u grands Serpens, partis d’Ethiopie , &
ayant près de vingt coudées de longueur (à) , & qui
auront donné lieu aux divers récits femblables de plu-
fieurs Voyageurs modernes.
Mais il n’en eft pas des Serpens comme des Quadrupèdes
vivipares : moins parfaits que ces animaux, moins
pourvus de fang, moins doués de chaleur & d’aélivité
intérieure, plus rapprochés des infeéles, des vers, des
animaux les moins bien organifés, ils ne craignent point
L’humidité lorfqu’ellé eft combinée avec la chaleur ;
elle femble même leur être alors très-favorable ; &,
voilà pourquoi aucune efpèce de Serpent ne paroît
avoir dégénéré en Amérique : ôn doit perifer, d’après
les récits des Voyageurs , qu’elles n’ont rien perdu
dans ces pays nouveaux, de leur grandeur ni de leur
force ; & même dans les terres les plus inondées de ce
continent, les grands Serpens préfentent une longueur
peut-être plus confidérable que dans les autres parties
du nouveau monde (à ) .
Si l’humidité ne, nuit pas aux diverfes efpéces de
Serpens, le défaut de chaleur leur eft funefte ; ce n’eft
qu’aux environs des contrées équatoriales, qu’on rencontre
ces énormes Reptiles, l’effroi des Voyageurs 5
& Iorfqu’on s’avance vers les régions tempérées, &
( a ) Pline, Livre huitième.
(i>) Voyez les articles particuliers de cette Hifloire,