Pyrénées; une très-petite portion du globe, un terrain de quelques
lieues carrées dans lequel la nature a réuni beaucoup de
formations, peut (comme un vrai microcosme des philosophes
anciens) faire naître, dans l’esprit d’un excellent observateur,
des idées très-précises sur les vérités fondamentales de la géo-
gnosie. En effet, la plupart des premiers aperçus de Werner,
meme ceux que cet homme illustre s’étoit formés avant l’année
1790, étoient d’une justesse qui nous frappe encore aujourd’hui.
Les savans de tous les pays, même ceux qui ne montrent
aucune prédilection pour l’école de Freiberg, les ont conservés
comme bases des classifications géognostiques. Cependant, ce
que l’on savoit en 1790 des terrains primitifs, de transition et
secondaires, se fondoit presque entièrement sur la Thuringe,
sur les montagnes métallifères de la Saxe et sur celles du
Harz, sur une étendue de pays qui n’a pas soixante-quinze
lieues de longueur. Les mémorables travaux de Dolomieu, les
descriptions des Alpes de Saussure, furent consultés ; mais ils
ne purent exercer une grande influence sur les travaux de Weiner.
Sans doute, Saussure a donné des modèles inimitables
d’exactitude dans la topographie de chaque cime, de chaque
vallon; mais cet intrépide voyageur, frappé et de la complication
que présentent les phénomènes de superposition et du
désordre apparent qui règne toujours dans l’intérieur des hautes
chaînes alpines, sembloit peu tenté de . se livrer à des idées
générales sur la constitution géognostique d’un pays. Dans ce
premier âge de la science, le type des formations étoit fondé
sur un petit nombre d’observations ; il ressembloit trop à la
description des lieux où il avoit pris naissance. On prenoit
pour des formations indépendantes les masses minérales qui,
dans d’autres pays, ne sont que des couches subordonnées ou
accidentelles; on ignoroit l ’existence des formations qui jouent
un rôle important dans l’Amérique équatoriale, dans le nord
et dans l’ouest de l’Europe; on méconnoissoit l’anciennété relative
des porphyres, des syenites et des euphotides ; on ne
complétait pas l’histoire des couches plus récentes par une détermination
rigoureuse des corps organiques fossiles quelles
renferment : on observoit avec une grande précision le gisement
des basaltes, des phonolitlies ( phorphyrschiefer) et des dolé-
rites, qu’on avoit long-temps confondus avec les grünstein trap-
péens; mais on combattait jusqu’à la possibilité de leur origine
ignée, parce que, dans le pays où la géognosie moderne
s’est formée, on n’était entouré que de quelques lambeaux de
terrains volcaniques, et que l’on ne pouvait examiner les rapports
qui existent entre les trachytes ( trapporphyr ) , les basaltes
, les laves plus modernes, les scories et les ponces. Si le
tableau des formations de Werner, malgré les livres qu’il consultait,’
malgré la surprenante perspicacité avec laquelle il savoit
démêler la vérité dans les récits souvent confus des voyageurs,
étoit resté incomplet, ce savant ne s’afïligeoit pas de voir ses
travaux perfectionnés par d’autres mains. Il avoit enseigné le
premier l’art de reconnoître et d’observer des formations. C’est
par l’application de cet art que la géognosie est devenue une
science positive. Reconnoissant que sa véritable gloire se fondoit
plutôt sur la découverte des principes de la science, sur
l’instrument qu’il falloit employer, que sur les résultats obtenus
à telle ou telle époque, Werner ne chérissoit pas moins
ceux de ses élèves qui ne partageoient pas son opinion sur
l’âge relatif et sur l’origine de plusieurs terrains. Ce n’est qu’en
soumettant à l’observation une plus grande partie du globe,
que lé type des formations a pu être à la fois agrandi et simplifié.
On l’a rendu plus conforme à la constitution géognostique
des continens considérés sous un point de vue général.
Nous connoissons aujourd’hui cl’une manière assez exacte le
gisement relatif de beaucoup de formations. i.° Dans Vancien
continent : dans les îles de la Grande-Bretagne, dans le nord
de la France, et en Belgique, en Norwége, en Suède et en
Finlande, en Allemagne, en Hongrie, en Suisse, dans les Pv-
rénées, en Lombardie, en Toscane et dans les environ? de