Quoique sur le continent les couches partielles qui cohipo»
sent le calcaire du Jura se soient très-inégalement développées,
et que l’ordre de leur succession varie souvent, on remarque
toujours un certain nombre d’assises distinctes et répandues sur
des étendues de terrain très-considérables. Nous les nommerons
en commençant par les plus anciennes : calcaire marneux (et
marnes calcaires très-dures) b leu-grisâtre, analogue ( d’après
MM. Boué et Buckiand, Essai géogn. sur l’Ecosse, gag. 201, et
Struct. of the Alps, gag. 17) au lias de l’Angleterre, quelquefois
traversé par des veines de spath calcaire, rempli de gryphées
arquées 5 oolitbes gris-jaunâtres, alternant aveci des marnes en
partie bitumineusés et avec du gypse; calcaire compacte à cassure
unie et matte, et oolithes blanches; couches remplies de
madrépores analogues au calcaire à polypier de Normandie et
au coral-rag de l’Angleterre ; calcaire schisteux avec poissons
et crustacés (Pappenheim et Solenhofifen). L’assise inférieure de
cette formation si complexe est particulièrement désigné, en
France (Bourgogne) et dans l’Allemagne méridionale (Wurtemberg),
sous le nom de calcaire à gryphites ; mais quelques géo-
gnostes penchent même pour l’idée de séparer cette assise du
calcaire du Jura, en la regardant, avec MM. de Buch et Bron-
gniart, comme appartenant au zechstein, ou avec M. Keferstein,
comme parallèle au muschelkalk. Ici se présente la question
importante de savoir dans quel rapport de gisement et de composition
se trouve le calcaire à gryphites du Jura avec celui qui
porte le même nom dans le Nord de l’Allemagne et que M. Yoigt
a fait connoître dès l’année 1792 ? Une grande analogie entre
les couches les plus voisines de deux formations qui quelquefois
se trouvent immédiatement superposées l’une à l’autre, n’a sans
doute rien de bien surprenant : les mêmes espèces de gryphées
pourroient se rencontrer dans des formations très-distinctes et
plus éloignées encore entre elles ; mais la liaison géognostique
observée entre le calcaire à gryphées arquées, alternant avec les
marnes, et les autres couches inférieures du Jura, me faitpen-
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cher pour l’opinion que ce calcaire, et le calcaire à giyphées
épineuses ( gryphitenkalk de Yoigt), placé sous le grès bigarré,
ne sont pas d’une même formation. M. Mérian, dans son excellente
Monographie des environs de Bâle, énonce aussi cette
opinion, et regarde, avec M. Ilaussmann, le grès argileux de
Rheinfelden, sur lequel repose le calcaire jurassique, comme
grès bigarré, tandis que M. de Buch (Mérian, Umgeb. von Basel,
g. 1x0) le prena pcmr le grès houiller, et suppose que, par le
non-développement du grès bigarré, les couches oolithiques et
lithographiques du Jura reposent, dans cette localité, immédiatement
sur les couches à gryphites qui appartiennent au zechstein.
J’ai cru de mon devoir d’exposer dans ce travail les opinions
des plus célèbres géognostes, lors même qu’elles sont
opposées à celles auxquelles je me suis arrêté.
Ce qui est indubitable et ce que nous croyons utile de rappeler
de nouveau , c’est que le calcaire jurassique qui repose
près de Laufenbourg sur du granité, au Schwarzwald sur le
grès rouge ou houiller, et près de Genève sur le calcaire alpin,
est placé, dans le centre et le nord de l’Allemagne, sur le qua-
dersandstein. La superposition d’une roche sur la foi’mation la
plus jeune détermine sa place comme terme de la série géognostique.
En Franconie et dans le Haut-Palatinat on 11e voit généralement
au jour que les assises supérieures du calcaire jurassique,
qui sont en même temps les plus compactes. Les marnes et les
oolithes y sont beaucoup plus rares que dans la Suisse occidentale
et en France (Caen, Lons-le-Saulnier ). Entre Eichstädt et
Ratisbonne on ti’ouve, de bas en haut, d’après M. de Schmitz,
du calcaire entièrement spongieux et bulleux; des couches grenues
renfermant des druses remplies de sable ; du calcaire compacte
et conchoïde avec des nodules de silex ; du calcaire schisteux
et fissile, analogue à celui de Sohlenhofen et aux dales
lithographiques du Heuberg près de Kölbingen. Ces assises spongieuses
, remplies de vacuoles (vallée du Laber près Berodhausen ;
Pegnitz, Creussen, Tumbach), que j’ai retrouvées en Italie
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