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rivière de Siam. Ce chantier est préfère à cause de l’excessif bon marche'
et de l’abondance des bois de construction, surtout du tek. La partie
qui est sous l’eau se construit de bois ordinaire, la partie supérieure
est faite en bois de tek. On emploie le fer pour joindre les pièces du corps
du navire et du bordage. On calfate très-adroitement avec une étouppe
extraite du bambou, et le fond est enduit d’une espèce de résine qu’on
appelle Damar en Malais, à laquelle on ajoute de la chaux; l’avant est plat
comme l’arrière, qui est la partie la plus large,, il n’y a point de quille,
il y a ime grande chambre à l’arrière, le gouvernail est placé dedans,
afin qu’il y soit protégé contre la mer. Les mâts sont au nombre de
deux ou de quatre, de grandeur fort différente. Le grand mât est
beaucoup plus élevé que les autres. Ils ne sont que d’une seule pièce,
il ny a qu’une seule voile à chaque mât, chaque voile est faite de
nattes de bambdu qui se replient. Il n’y a qu’un seul pont. Tout
I intérieur est divisé en petites chambres ou compartimens, pour placer
les marchandises et pour loger les passagers. L’usage des pompes est
inconnu, ou du moins on ne s'en sert point pour ôter l’eau. Les cables
sont faits de rottings tressés; les ancres sont de bois de fer, ayant
seulement leurs pattes en fer. Les agrès sont de rotting ou de coir,
marnent du cocotier. En général la figure d’ung jonque chinoise a
un aspect grotesque; le pont a la courbe d’un croissant, de chaque
coté de l’avant, il y a un cercle en forme d’oeil; ces navires, sont mauvais
voiliers et manoeuvrent mal, excepté sous le vent. Il faut un nombreux
équipage pour les gouverner; si l’on a besoin de 4 hommes par ioo
tonneaux dun navire européen, il en faut environ 4o pour la même
capacité d’un navire chinois. Dans un grand bâtiment, il faut 5o hommes
uniquement pour la barre.
La force des jonques dépend de la nature des ports qu’elles fré^-
queutent ; il y en a depuis 200 jusqu’à 1,200 tonneaux; la plupart de
celles qui font le voyage.de Batavia àEmoy ont cette dernière dimension.
II n y a pas de probabilité que les Chinois améliorent la construction
. de leurs navires, car tout changement dans cet empire est une trahison.
DU COMMERCE AVEC LES CHINOIS. l 3 5
Les officiers d’une jonque sont : le commandant ou capitaine, qui a
la surveillance de tout l’équipage, le pilote qui dirige le cours de la
navigation, le maître de quart qui surveille le sillage. L’ordre s’observe
facilement , car ia subordination est le caractère distinctif de ce peuple.
L’art de la navigation leur est inconnu, ils ne suivent qu’une coutume
vulgaire. Ils ne font point d’observations astronomiques, ne prennent ni
longitude, ni latitude; la boussole est divisée en 24 parties, qui répondent
probablement à la division ancienne de la circonférence parmi eux,
avant qu’ils eussent la connaissance de la variation de l’aiguille
aimantée. Selon Du Halde les boussoles sont faites à Nangazacki au Japon,
l’on pourrait en conclure que la boussole est venue du Japon à la Chine,
l’on sait d’ailleurs que le. Japon a reçu avec avidité les usages, l’instruction
et même la religion de l’Europe.
L’ignorance des marins Chinois a moins dïnconveniens qu’on pourrait
le présumer, parce qu ils ne mettent à là voile qu’au moment de
la mousson favorable. Le voyage de Batavia à Emoy est de 20 à 25
jours, et ce voyage ne se fait qu’une fois par an. Cette connaissance
exacte des moussons préserve les Chinois, des naufrages et des tempêtes.
Mr Crawfurd ne se souvient que d’un seul exemple de jonque qui ait
péri dans l’espace de six années; lequipage et une partie de la cargaison
furent sauvés.
Le chargement d une jonque n’est pas la propriété d’une seule personne,
il appartient en grande partie . aux passagers, qui occupent tous les
compartimens du navire. Les principaux passagers ont à leur consignation
particulière les marchandises d’une ou plusieurs familles qui
demeurent soit dans les îles, soit en Chine. Pour quelques articles considérables
comme le thé et les porcelaines, les bénéfices que l’on fait
sur les prix, dans les ports de 1 archipel indien, sont de 15o à 200 pour
cent; ceux sur la soie et le coton, d’environ 100 pour cent. Ces profits
sont ceux du détail, car aussitôt que les jonques, arrivent au lieu
de leur- destination, dans Iarchipel indien, on ouvre.des boutiques et
les marchandises sont vendues par les propriétaires eux-mêmes.