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en petits morceaux; ils n’ont pas besoin de couteau, de fourchette ou
de cueiller : l’eau est la principale boisson, on la fait bouillir pour
la boire. Quelquefois on y mêle de la canelle et d’autres épiceries, on
boit du thé plusieurs fois le jour.
Dans les repas de cérémonie il y a un grand nombre de mets.
Les Javanais font deux repas chaque jour, un peu avant midi et
entre 7 et 8 heures du soir; ils n’ont point de repas qui corresponde
à notre déjeûner, mais lorsqu’ils sortent dans la matinée, ils prennent
auparavant une jatte de café et un gâteau de riz, ou achètent quelques
commestibles aux nombreuses échoppes dont la voie publique est
parsemée.
L’on mâche fréquemment du siri, c’est ainsi qu’on appelle les feuilles
de betel, saupoudrées de pinang et de noix d’arèque, cet usage est
général dans l’archipel indien et le midi de l’Asie. On étend avec une
cueiller sur la feuille de siri une petite quantité de terra japonica,
substance d’un amertume agréable, et un peu de chaux vive. On y
ajoute de la noix d’arèque, qui est narcotique, on en fait une boule
que l’on mâche; les dents deviennent d’un noir de jais par le grand
usage de cette matière corrosive.
La boîte de siri n’abandonne jamais les personnes de distinction et
surtout les femmes ; elles en ont le même soin et y attachent le même
prix que nos dames à leurs sacs à ouvrages dont la mode change si
souvent le nom. Une dame javanaise a les lèvres de couleur vermillon
après avoir mâché du siri.
L’usage du tabac à priser est répandu dans toutes ces contrées; ce
qui étonnera le plus, c’est qu’il y est connu sous le nom de Tabacco
comme dans tout le reste de l’univers. Les annales de Java rapportent
que cet usage s’y introduisit en 1601, quarante ans après qu’il fut importé
dans le midi de l’Europe et i5 ans après son introduction en Angleterre.
L’usage de fumer le tabac, est aussi introduit dans ces contrées, l’on
y fait des cigares d’un parfum délicieux.
K t REPAS. ÜI
On préparé deux espèces de liqueurs fermentées, le badek et le
brom; on fabrique lé badek en faisant bouillir du riz glutineux dit
Ketang avec un levain nommé ragi, composé d’oignons, de poivre noir
et de capsicum. La matière est roulée en bouleS et entassee dans un
grand vase de terre ; lorsque la fermentation commence, la liqueur trans-
sude ; on la trouve au fond du vase.
Le résidu qui a un goût assez doux et une odeur de fermentation est
vendu au marché comme un objet de friandise. Le badek porte
légèrement à la tête. On l’administre quelquefois aux enfans pour
faire sortir les vers des intestins.
On fabrique le brom en faisant aussi bouillir du ketang avec le ragi
et en le laissant transsuder, mais la liqueur qui en provient est enfermée
sous terre pendant plusieurs mois pour la concentrer; quelquefois on
la fait bouillir. La couleur du brom est brune, jaune ou rouge, selon
la qualité du riz. Lorsqu’on le conserve plusieurs années, il acquiert
un degré d’esprit assez fort pour enivrer : il donne de violents maux
de tête .aux personnes qui ne sont pas accoutumées a le boire.
On fabrique à Souracarta une espèce de bierre selon les procédés
(j(. l’Europe; on provoque la fermentation par une dissolution de sucre
de Java avec diverses épiceries. Les feuilles de pariremplacentlehoublon.
Cette liqueur, lorsqu’elle est fraîche, fermente beaucoup et n’est pas
désagréable, mais on ne peut la conserver que cinq à six jours.
La passion des Indiens, pour l’opium est excessive, cette drogue leur
a été primitivement apportée par les Arabes ; la plante qui le procure
ne croit point dans l’arcbipel indien, ce qui est un bonheur pour ces
peuples, car le prix seul peut en limiter la consommation. Rien de plus
dangereux que l’usage de ce narcotique, dont l’abus est plus terrible
que celui du thé, du tabac et de toutes les autres denrées réunies
que le luxe a inventé pour satisfaire l’oisiveté.
Son ivresse excite la fureur, les yeux sont hagards, le teint livide ;
il fait maigrir.