
6 8 CHAPITRE X IV ,
» inférieurs, que j’ai délivré ces lettres à mon serviteur, afin de lui
» accorder la grâce de prélever sur la terre pour sa subsistance, le
» montant de onze cents chachas ou travail de 1100 hommes. »
En général les neuf dixièmes de la population sont adonnés à l’agriculture,
dans le Pre'anger Regenschappen, sur 243,268 habitans, 209,12$
sont cultivateurs, dans la province de Sourabaya la proportion est
comme 32,618 sont à 634-
Les sept huitièmes de l’île sont en bruyères et incultes, mais le dernier
huitième indemnise le laboureur avec une telle abondance, qu’au-delà
de quatre millions huit cent mille habitans vivent aisément, car il n’y
a pas un seul mendiant dans l’île entière; aucune partie cultivée des
deux hémisphères n’est égale à Java par la quantité, la variété et
l’abondance intarissable des productions végétales. La terre peut fournir
jusqu’à trois récoltés dans la même année, sans qu’il soit nécessaire
de varier la culture. Les coteaux et les vallons sont perpétuellement
couverts d’un engrais d’alluvion que les eaux abondantes et les pluies
périodiques y apportent. Nulle part il n’y a de terre ingrate, partout
la nature paie avec usure les plus petits soins du laboureur.
Le paysan javanais, heureux de l’état le plus prospère que l’homme
des champs puisse désirer, ne cherche point à améliorer sa situation :
un ouvrier gagne facilement la valeur de 4 à 5 katis de riz dans une
journée, im seul kati qui équivaut à 5 quarterops de poids européen,
suffit pour sa nourriture.
Les femmes gagnent autant que les hommes, elles fabriquent presque
tous les .objets d’économie domestique et d’habillement.
Nous le répétons, le sol de Java quoique négligé dans quelques
contrées, est cependant bien cultivé dans les parties habitées; tous les
produits des régions équatoriales pouvant y croître avec abondance,
la hauteur de ses montagnes présentant une gradation de température
depuis les tropiques jusqu’à des latitudes très-avancées dans les*, deux
zones tempérées ; cette île est susceptible d’une immense amélioration
agricole.
DE L ’AGRICULTURE. 6 9
Nous y avons établi le siège d’un des plus grands empires du globe
terrestre. Supposons-y, comme au Mexique, une population dont la
majorité soit d’origine européenne, que l’on juge des progrès étonnans
que l’agriculture, l’économie rurale et les arts qui en dépendent, feraient
en très-peu d’années, car les sciences et les arts ont reçu en Europe un
tel degré de développement et d’utilité, qu’on ne peut mettre en parallèle
avec nous, les peuples les plus éclairés de l’Asie et les souvenirs les
plus brillans de l’antiquité, que l’on juge par conséquent des fortunes
que ces colons européens apporteraient à la métropole en se repatriant:
l’île de Java présente une étendue en milles carrés qui n’est guères moindre
que le Mexique, nous possédons à côté de Java, l’île de Sumatra
qui est d’une moitié plus vaste que Java, et qui surpasse le Pérou sous
tous les rapports ; nous possédons en outre Bornéo, riche en diamans
et en mines d’or, Gélèbes et tant d’autres grands domaines, dont les
noms sont à peine connus parmi nous. J’ose le dire avec la fierté qu’inspire
la vérité, des esclaves ne forment point la majorité de la population
de nos îles, elles sont cultivées et enrichies, par des agriculteurs aussi
libres que nous. Notre royaume des Pays-Bas dont la population est
égale à la moitié de celle de l’Espagne, surpasse de beaucoup l’Espagne
en grandes villes, en richesses territoriales et mercantiles , en marine,
en industrie et en lumières. Nos possessions des Indes-Orientales sont
incontestablement supérieures à l’Amérique espagnole, aux îles Canaries
et Philippines. Batavia offre plus de population et une plus grande
importance que la capitale du Mexique, l’accroissement de nos colonies,
ferait accroître notre marine et prospérer nos manufactures européennes.
Ainsi notre royaume des Pays-Bas est d’une valeur beaucoup plus
considérable qu’on ne le pense, dans la balance politique de l’Europe et
dans la statistique de l’univers.
Un laboureur javanais exploite sa métairie avec une paire de buffles
ou de boeufs ; il ne se sert point de chevaux, quoiqu’il y en ait beaucoup
dans l’île. Le buffle de Java, moins grand que celui de Sumatra et
12