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Les figures (voyez planche a3,) ont 18 pouces à deux pieds anglais
de hauteur, elles sont de cuir de buffle, dessinées et travaillées avec
beaucoup de soin; ces figures sont ordinairement grotesques, leur nez
est excessivement alongé. On assure par tradition que les premiers
wayangs furent ainsi défigurés par le Sousouijan Maria, l’un des premiers
apôtres mahométans, afin de rendre cet antique amusement
compatible avec les préceptes de l’islamisme, qui défend toute représentation
de la figure humaine. « Par ce moyen, disait le Sousounan
» avec beaucoup d’ingénuité, si un jour les peuples de Java oubliaient
»■ les originaux historiques et confondaient ces figures avec la ressem-
» blance humaine, ils seraient pénétrés de l’idée que leurs ancêtres
» n’ont eu le bonheur d’avoir la face humaine que depuis leur conver-
„ sion à la loi du prophète. » Cette tradition est douteuse, parce qu’on
trouve des figures grotesques de la même espèce à Bali, où le bra-
minisme s’est conservé.
Ces figures sont attachées par un clou de corne, elles ont un morceau
de corne à chaque main pour les faire mouvoir. Une étoffe blanche
en forme de rideau est tendue devant les spectateurs, sur un cadre
de 10 à 12 pieds de long sur cinq pieds de haut, on le rend transparent
au moyen d’une lampe suspendue par derrière. Le gamelan
commence la représentation, les figures jouent la scène, et le dalang
prononce le dialogue.
Il y a trois espèces de wayangs ; la première est le Wayangpourwa,
les plus anciens de tous; les sujets sont puisés dans la mythologie avant
le règne de Parikisit et jusqu’à ce prince. Les dieux, les demi-dieux et
les héros de Java et de l’Inde sont mis en action, selon les poèmes
de Rama et de Mintaraga, contenant la pénitence d’Arjouna sur le
mont Indra et le fameux Brata Youdha ou la guerre de Pandawa.
Le dalang récite d’abord quelques vers en kawi, qu’il accompagne
d’une interprétation pour les personnes ille'trées., il fait paraître les
acteurs derrière le rideau, on voit l’ombre de leurs costumes, les
DES REPRÉSENTATIONS THEATRALES. 2 8 5
spectateurs sont pénétrés du sujet, s'y intéressent, écoutent pendant
des nuits entières l’histoire merveilleuse de leurs ancêtres et sont dans
l’extase.
Le Wayang gedog est pris dans la période de l’histoire, depuis
Parikisit jusques et y compris le règne de l’infortuné Panji et celui
de Laléan,’ son successeur, à l’époque de l’établissement de ce dernier
à Pajajaran. Le Gamelan Pelag accompagne la représentation, le
dalang récite le poëme en javanais.
Le Wayang Klitik est plutôt un jeu de marionnettes que d’ombres
chinoises; les figures sont de bois, d’environ dix pouces de hauteur,
peintes et dorées avec soin. On ne se sert point de rideau transparent.
Le sujet est puisé dans l’histoire de l’empire de Pajajaran et jusqu’à
la fin de l'empire de Majapahit. Les aventures de Menak Jing’ga, chef
de Balembang’an et de Demar Woulan (Lumière de la lune > ainsi que
les malheurs de la princesse de Majapahit sont le plus communément
représentés. # ^ fj
Toutes ces représentations entretiennent la connaissance de lhistoiie
nationale parmi le peuple javanais, qui est aussi avide de cet amusement
que nos; peuples d’Europe sont avides de théâtres, t
La profession de dalang est traitée avec respect, leur emploi
ressemble sous plusieurs rapports à celui des anciens bardes. ,Ils sont
les auteurs et les-directeurs de leurs pièces. La cérémonie qui leur
est confiée, de donner la bénédiction au premier enfant de chaquer
famille , en répétant divers passages des anciennes légendes, ajoute un
haut degré de considération à l’emploi de dalang.
Outre ces représentations, il y a une espece de wayang appelée
Wayang beber, c’est un assemblage de feuilles pliées de fort papier,
sur lesquelles le sujet est dessiné. Le dalang en donne l’explication
pendant qu’on déploie les feuilles. Le-sujet est pris dans le récit
arabe, do liagin Ambia. Un tambour et la musique du gamelan animent
l’action.
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