
2 0 0 CHAPITRE L I ,
inférieure à la langue javanaise, il n’est pas aussi riehe que les autres
langues orientales en expressions figurées , rien ne dénote en lui une
antique culture , il paraît provenir du langage primitif des peuples
malais qui en est la base, de la langue de la Polynésie et du sanscrit.
-Beaucoup de mots arabes, et hollandais et même anglais y ont été
introduits, si on peut désigner ce mélange par des nombres, on y
trouve: Malais primitif 37 parties, polynésien 5o,-sanscrit 16, arabe 5,
autres langues telles que le hollandais, le portugais et même l’anglais 2.
Mr Marsden et le Dr Leyden , ( asiatic researches vol. x ) ont fait
connaître tout ce que la littérature malaise renferme d’intéressant, elle
porte une empreinte arabe. Leurs compositions poétiques sont de deux
espèces : le Pantum et le Sayar. Le pantum est une stance de quatre
vers, rimant alternativement, les deux premiers, sont souvent figurés,
les deux derniers sont moraux, sentimentaux et amoureux, on récite
quelquefois des pantum dans de controverses qui durent plusieurs heures.
Le sayar ou plutôt schaiar est d’origine arabe selon que son nom
l’indique. C’est une suite de couplets formés de vers de huit à douze
syllabes, ayant beaucoup de ressemblance avec la poésie européenne.
II y a beaucoup de compositions en prose surtout des romans et
des fragmens d’histoires réelles, presque toujours mêlées de fables.
La paraphrase javanaise du Mahabarat et du Ramayana, les avantures
du malheureux Panji sont les meilleurs classiques de cette langue.
Nous citerons pour exemple de compositions en prose, un fragment
de l’histoire de Hang Touah, amiral du roi de Malacca, à l epoque de
l’invasion d’Albuquerqpe.
« Alors les serviteurs apportèrent les liqueurs et des coupes incrustées
» de pierres précieuses, on les plaça devant les chefs de divers rangs.
» Les tambourins battaient, les jeunes personnes à la voix douce
» chantaient des airs mélodieux. Les hôtes se livraient au plaisir;
». on se leva pour danser. L’amiral commença après avoir salué respec-
» tueusement le prince. Il se leva, tenant en main la poignée de son
DU LANGAGE DES MALAIS. 2 6 1
» kris, ouvrage des forgerons de Malacca. Il dansa fort bien, se
» courba devant le prince, il était heureux. Le jeune prince était
» satisfait de ce qu’il voyait, ses yeux ne pouvaient se rassasier de
» ce spectacle; assurément, se disait-il en lui-même, Hang-Touah est
» un brave, sa contenance le décèle. Ensuite Toun Jabbat salua le
» prince et se leva pour danser. Lakyer et Lacyn prirent les coupes des
» mains de ceux qui les avaient remplies; engagèrent Hang Kastoun a
» danser, celui-ci défia l’Adipati de Palembahg. Les chefs dans leur joie,
» criaient fort haut. L’Adipati salua et se leva pour danser. Il défia
» Toun RanaDiraja. Celui-ci s’inclina et Se leva. Toun Touah, Hang
» Jabbat et Hang Eestouri prirent les coupes des mains de ceux qui
» versaient la liqueur. Ils dansèrent les coupes à la main, et défièrent à
» boire Toun Rana Diraja. Celui-ci fut vaincu, perdit la raison, s’assit
» et pencha la tête. Le jeune prince se réjouissait et riait aux éclats,
,, en voyant l’état ou ce chef était réduit. Les tambourins battirent de
» nouveau. Le prince jeta un coup d’oeil à Toun Touah, afin qu’il
» pressât Toumoungoung Sri Sorojà de boire. Toun Touah prit une
» coupe, la tint à la main, tandis qu’il dansait. Il la remplit pour le
» Toumoungoung et la lui présenta en disant ibuvez, monseigneur, selon
» le commandement du jeune régulateur du royaume. Le Toumoungoung
,> entendant le commandement du prince, prit la coupe et la plaça
» respectueusement sur sa tête, ensuite il but, s’inclina et se leva pour
» danser. Les serviteurs lui offrirent des nouvelles coupes. Le Tou-
» moungoung présenta la coupe au Bandahara, celui-ci l’accepta, et se
» leva pour danser quelques pas, il abaissa son kris et s’inclina aux
» pieds du prince. Le prince s’aperçut de l’intention de son ministre,
» il se leva et .l’embrassa. Le Bandahara prit la coupe de nouveau,
» la but ; il était ivre. Le prince se leva et dansa. Le Bandahara prit
» une coupe aux serviteurs,: il la remplit, dansa et la présenta au prince.
» Le prince prit la Coupe, en disant, mon cousin, je;suis deja ivre.
» Tous les chefs s’enivrèrent l’un après l’autre. Quelques-uns eurent