
CHAPITRE XX,
DE l ’em plo i des c i iam p ig to n s en m é d e c in e .
Après avoir parlé assez longuement des propriétés malfaisantes
des champignons, je crois devoir dire quelques
mots des propriétés médicales attribuées à plusieurs de ces
plantes.
La médecine en faisait autrefois un usage assez fréquent,
aujourd’hui cet usage est à peu près entièrement abandonné
; mais sans doute on y reviendra, car le plus souvent
la médecine, après avoir longtemps délaissé, sans trop
savoir pourquoi, l ’usage de tels ou tels médicaments, un
jou r vient q u ’elle les sort de l ’oubli où elle les avait
laissés.
Parlons d ’abord de l ’emploi que les anciens faisaient de
ces plantes.
Selon Pline , le champignon que de son temps on appelait
Agaric, et que les pharmaciens continuent à appeler
de ce n om , le Bolet du Mélèze, Polypore officinal des
mycologistes, pris en boisson, à la dose de trois oboles ( i)
(2 gramm. a 5 centigr.), dans un cyatbe (o litre o/,5) de
(1) Obole, la sixième partie de la drachme. Cyatbe, la douzième partie
d u patarin .
vin vieux, guérissait la strangurie et la splénito. Ce champignon,
donné de la même façon et aux mêmes doses,
guérissait le n erf ap p e lép la l j s (le tendon d ’Achille?) et la
douleur d ’épaule. On le donnait aussi réduit en poudre à la
dose de 4 oboles (3 gramm. 45 centigr.) dans deux cyathes
(o litre og) de vinaigre.
Les anciens distinguaient l ’A garic mâle et l ’Agaric femelle,
tous les deux de couleur blanche et croissant sur les
arbres. Le mâle, dit Pline, est plus dense, plus amer ; il
cause de la céphalalgie. L ’Agaric femelle, moins consistant
que le mâle, a une saveur d ’abord douce, mais qui bientôt
devient amère.
JNous ne savons pas trop si ce que les anciens appelaient
Agaric mâle et Agaric femelle étaient deux espèces distinctes,
ou s’ils n ’étaient pas, ce qui est très-vraisemblable,
de simples variétés d ’une même espèce. Quoi q u ’il en soit,
l ’Agaric qui venait de la Gaule passait pour plus faible que
celui que l ’on recueillait aux environs du Bosphore.
On les employait contre les fiux de ventre. On les fa isait
entrer dans la préparation des médicaments appelés
ophthalmiques, dont on se servait pour bassiner les yeux.
On les employait pour faire disparaître les lentilles [lenti-
gines), les taches de rousseur et autres taches qui viennent
sur le visage des femmes. On les employait contre les éruptions
et ulcères sordides de la tête, contre la morsure des
chiens, comme aussi pour réprimer les excroissances qui
viennent au fondement ( i ) .
Voyons maintenant quel usage la médecine a fait des
champignons dans des temps plus rapprochés de nous, et
quel usage elle en pourrait faire encore.
La fausse Oronge,- administrée en poudre, à l ’intérieur,
(I) Pline, 1. 22-58; 1. 25-57; I. 26-48.