que à laquelle un emprunt, émis à Paris et à Bruxelles, a
permis à la Compagnie franco-belge de marcher de l’avant,
les travaux ont été poussés activement (du côté de Hankéou,
ils s’étendent déjà à plus de cinquante lieues); mais le plus
difficile sera de traverser le Hoang-ho, ou fleuve Jaune, fleuve
vaseux, dont le lit changeant occupe un très large espace.
On ne peut se faire encore une idée bien précise des conséquences
qu’entraînera la réalisation de cette entreprise. Mais
il n’est pas aventuré de prévoir que Hankéou deviendra
rapidement une cité immense, extraordinairement prospère,
le grand entrepôt de la région du Yang-tse, la capitale économique
de la Chine centrale. Prolongement du Transsibérien,
cette ligne nouvelle va mettre Hankéou à vingt-cinq
jours de Paris, à quinze jours des frontières de l’Europe.
Grâce aux eaux qu’accumulent, l’hiver, et qu’épanchent,
au printemps, les montagnes du Tibet oriental, nous avons
pu atteindre ce point, situé à onze ou douze cents kilomètres
de la mer. Le but de ce voyage était double : donner plus
d’éclat à l’inauguration du « quai de France », et, par le
groupement du Charner, du Bugcaud (qui ne vint pas, sa
présence ayant été jugée indispensable ailleurs), de la
Décidée, relever le prestige du pavillon français dans une
région où il n’avait pas paru depuis plusieurs années. Déjà,
pendant l’année précédente, deux canonnières françaises
s’étaient laissé bloquer à Hankéou par les basses eaux, en
compagnie de canonnières anglaises et allemandes.
Si l’Europe l’avait jugé alors nécessaire, elles auraient été
en mesure de couper les vivres à la cour de Pékin, réfugiée
à Si-ngan-fou. Hankéou, la ville commerçante, et Han-
Yang, la ville industrielle, sont bâties, en effet, sur les deux
rives du Han, à son confluent avec le Yang-tse. Le Han,
venu du nord et navigable aux jonques sur un long parcours,
passe à quatre ou cinq journées de marche de Si-nganfou.
C’était la route alimentaire des réfugiés. A Hankéou,
-on en tenait la porte. La bienveillance des Européens maintint
ouverte cette porte, et laissa passer les approvisionnements
de toutes sortes, envoyés par les riches provinces qu’arrose
le Kiang et par les provinces même du sud. Les canonnières
jouèrent seulement le rôle de sentinelles chargées de
surveiller les événements ; mais le voyage de la division
Plan de Hankéou.
française avait pour but de montrer, sur ce point, autre
chose que des canonnières.
D’autre part, ce « quai de France », dont 1 inauguration
suffirait à justifier notre voyage, a une valeur non seulement
commerciale, mais, pour ainsi dire, morale, de premier ordre.
Il faut féliciter la municipalité de la concession française
(Français et Anglais ont ici leur conseil et leur police a
part) d’avoir mené à bonne fin une oeuvre de longue haleine,