bibelots. A dix minutes- de là, derrière cette même porte,
deux officiers du bord recevaient des cailloux. Montés sur
leurs anes (c’est le seul moyen de locomotion pratique dans
cette ville qui a trente-quatre kilomètres de tour, et dans ces
rues aussi étroites que sales), ils ont chargé la foule, qui s’est
dispersée. Nos « suiveurs », au contraire, riaient, nous
demandaient des cigarettes, touchaient l’étoffe de nos vêtements,
avec une curiosité qui n’avait rien d’hostile.
Notre civilisation les étonne, et, comme elle leur apparaît
presque uniquement sous l’aspect agressif, les met en
défiance. Ont-ils tort de préférer la leur? Celle-ci, en tout
cas, a son caractère bien particulier, et pas si facile à définir.
A de certains moments, on la dirait voisine de l’état primitif;
à d’autres, elle se révèle très ingénieusement raffinée. Ce
sont des enfants, et ce sont des vieillards.
Ils savent utiliser parfois de façon bien pratique les ressources
que la nature met à leur disposition. C’est
que, pour le transport des canards, objet d’un important
commerce par toute la Chine, ils empruntent, dans le bassin
du Yang-tse, au fleuve son courant, aux pattes des canards
leurs mouvements de nage. Les volatiles sont mis purement
et simplement à l’eau, et ainsi conduits en aval, entre deux
sampans, qui dirigent et maintiennent compact le troupeau.
C est chose curieuse que de voir un train de canards sur
le grand fleuve. De loin, dérivant au fil de l’eau, c’est une
masse grisâtre, enserrée entre les deux sampans, dont, seuls,
les contours apparaissent avec netteté. Est-ce du bois qui
flotte ? La conjecture est vraisemblable. Quelque chose vous
dit pourtant que cette masse n’est point inerte. Elle se
rapproche. L ’oreille vient au secours des yeux. D’innombrables
coin-coin se font trop clairement entendre. Des ailes
s’agitent, sans que le corps quitte la surface de l’eau, et
messeigneurs les canards passent, criant, nageant à qui