« Le temple qu’il nous a été donné de visiter ressemble à
tous les temples bouddhiques. A des statues immenses, toutes
dorées, représentant les dieux de la terre, de la guerre, en
sont mêlées d’autres qui représentent les philosophes, les
guerriers illustres. Au centre, un énorme Bouddha, à la physionomie
béate, croise les mains sur son ventre. Kouang-yn,
déesse de la fécondité et de la miséricorde, étend ses cent
bras au-dessus des cassolettes où brûlent les parfums. Partout
des lanternes de toute forme et de toute couleur.
Au moment où nous visitons le temple, les bonzes sont en
prière; ils accompagnent leurs mélopées en frappant sur des
espèces de tambourins. Mais leur foi semble toute machinale.
Ils sont bonzes aujourd’hui, mais, demain, ils pourront
ne plus l’être. Il leur suffira de laisser pousser leurs cheveux
et d’abandonner leur robe. La bonzerie pour ceux qui
y entrent est surtout un refuge contre la misère. Ils vivent
d’aumônes : la joie du supérieur dépassa toutes les bornes
quand nous lui remîmes quelques piastres. Quant à leurs
habitations, elles font très bien dans le paysage, mais nous
aurions mieux fait de n’en pas vérifier la saleté intérieure,
que nous devinions. Heureusement, ils ne peuvent salir la
verdure des gorges et l’écume des cascades.
« La descente de la montagne se fit plus rapidement que
ne s’était faite l’ascension. Mais nos jambes demandaient
grâce, et c’est avec un soulagement profond que nous les
allongeâmes dans le house-boat mouillé au bas de la montagne.
A sept heures, nous étions rentrés à Pagoda, ravis de
notre pèlerinage. »
Avant de mouiller en rade de Hong-Kong, nous avons
passé une journée entière à Bocca-Tigris, devant les forts
qui défendent l’entrée de la rivière de Canton. Bocca-Tigris,.
ce nom n’a pas besoin d’explication étymologique ; mais
toute ma bonne volonté n’a réussi qu’à découvrir une ressemblance
bien vague entre les dents qui arment la gueule
du tigre, et les forts dont sont hérissés ces promontoires (1).
Il faut dire que le nom a été infligé à Houmoun par les Européens.
L ’amiral nous a quittés là pour aller à Canton passer
la revue des canonnières. Et, depuis que je suis à Hong-
Kong, voici la cinquième nuit que je couche sur le pont :
nos chambres sont intenables. Je suis descendu à terre : on
n’y meurt plus de la peste; et l’on assure qu’elle n’a produit
que dix-sept décès, en un an, parmi les Européens. Ne calomnions
pas la peste : la dysenterie est infiniment plus
meurtrière
(1) « Pour entrer dans la rivière Chou-Klang, sur laquelle est située, nous avons à, franchir la Bouche du Tigre (Bocca lTa ivgirlilse ddees CPaonrttoun
gtraaivs,e rdsoenntt leusn Ae npgaslasies éotnrot iftaei tq Buoi gcuoen, teonu rcnhei nlo’Iilse Hdouu T-Migorue;n )c. eItctie, Illees, bsâittiuméee natus lcao mplmuse nvcreamiseenmt bdlua bdleel, tac,’ ersatp qpuelel es avnags udeomueten ta luat rteêftoe ids ’ulens tfiogrrteif. iLca’etixopnlsic datei olna cote Inspiraient une Idée de terreur. » (Prince Ouktomsky, Voyage en Orient
du czarevitch.)