(S trau ss. La Chine, son histoire, ses ressources ; Bruxelles, 1874,
in-8°.) C’est le py-ta/n, hors-d’oeuvre et apéritif traditionnel. On le
coupe en tranches extrêmement minces.
Les boissons chinoises ne sont pas nos vins et nos liqueurs, quoique
les Chinois, dans les occasions officielles, fassent grand usage du
champagne. Ils ont des vignes, mais « vin de vigne n’ont pas », disait
déjà Marco Polo. Dans l’intimité, ils ne boivent que des boissons fer-
mentées, et c’est avec le « vin de riz » qu’ils s’enivrent. « Ce vin de
riz se fait, non pas avec toute sorte de riz, mais avec la variété glu-
tineuse qu’on cultive ad hoc et qu’on nomme ngo-mi. Cependant le
riz ordinaire peut aussi donner du vin, mais moins abondant et moins
bon. Pour obtenir la liqueur, on met le riz dans un grand vase de
terre, et l’on y ajoute du levain. Au bout de cinq ou six jours en été
e t plus en hiver, la fermentation a été suffisante pour que le vin soit
formé... On ne distille point, mais on décante simplement : l’alambic
n’est employé que pour avoir l’eau-de-vie que les Chinois appellent
chao-tsiou ou vin brûlé. Ce vin de riz est très faible, mais il possède
un petit goût acide qui le rend agréable pendant les chaleurs. » (Abbé
Arm. D avid, Journal de mon troisième voyage en Chine, t. I er,
ch. xvi.) Il ne faut pas confondre l’eau de riz ou vin de riz (tsiou),
vin tout artificiel, sorte de bière, obtenue par une fermentation d’eau
et de grains avec un levain de farine en briques (G irard , France et
Chine, t. II, chap. xiv) et le véritable alcool (san-choun) qu’on
obtient par distillation, vin trois fois brûlé, dont on augmente la force
en y mêlant quelques gouttes d’essences diverses (de C ouroy, L’Empire
du milieu). Ces eaux-de-vie, d’ailleurs, sont bues chaudes.
M. Maurice Irisson (Etudes sur la Chine contemporaine, Chamerot,
1866, in-8°), assure que si les Chinois ne boivent pas de vin, c'est
qu’ils en auraient trop bu autrefois, et que les empereurs ont dû en
interdire la fabrication. Mais les édits impériaux auxquels on fait
allusion paraissent se rapporter aux boissons fermemtées distinguées
plus haut par l’abbé David.
Ce même abbé nous apprend que le lait, le vrai lait, le lait de vache,
est presque entièrement inconnu en Chine. Le Chinois, sauf les Mongols,
en ont horreur. Ils ne veulent pas traire leurs vaches. Quelques-
uns servent aux Européens un lait très épais que donne la femelle du
buffle. Ce lait de buffle plus ou moins sauvage ou d’yack, est mal préparé
et sale, disent les membres de la Mission lyonnaise, qui ajoutent
: « Quand le lait est ordonné, ce qui est assez fréquent, par les
médecins chinois, on emploie alors le lait de femme. Quand un vieillard
tombe en enfance, on lui donne une nourrice » (p. 186 de la
l re partie). L’Anglais Milne, si bien informé, dit que le lait de
nourrice se vend 10 ou 12 cents la tasse. On conçoit donc qu’un Européen
qui, volontiers, au cours d’une promenade à la campagne, boit
une tasse de lait, soit ravi d’en trouver enfin une dans un restaurant
de Bubbling-well.
DEUXIÈME PARTIE
Sur le Yang-Tse. — Chin-Kiang et Nankin.
I
DE SHANGHAI A NANKIN (novembre içoo)
CHIN-KIANG
Sur votre carte de Chine, Nankin doit paraître tout près
de la mer; en réalité, la distance est de cinquante à soixante
lieues. Le samedi io, à onze heures trois quarts, nous partions.
La descente de la rivière de Shanghaï s’est bien
effectuée; mais, arrivés non loin de l’embouchure du Yang-
tse, nous avons été pris dans un vaste banc de brume.
D’abord, le navire a continué à marcher, les vigies du haut
des mâts voyant par-dessus le brouillard; mais bientôt les
vigies mêmes ont été enveloppées par ce nuage opaque, et
nous avons dû mouiller au beau milieu du chenal. On entendait
le tintement des cloches des bâtiments de guerre et les
sifflets des bâtiments de commerce; mais on ne voyait rien,
et l’on était réduit à méditer sur cet important problème :
Pourquoi les cloches des Japonais rendent-elles des sons
graves, alors que celles des Allemands ont des sons aigus ?
Notre pilote n’a été que prudent en se refusant à nous