diligence, que tous leurs complices fbient fèrviteurs,
ouaultres, feffent femblablement. Créez moy, ven-
ra le temps, ou toft, ou tard, en ce fiée le , ou en
l’autre, que eux tous jugeront mes paroles eftre véritables
, feintes, & profitables, ou en felvation,
579 doubte , que c’eft grande 8c deube mifericorde de
l'en retraire , vueille,- ou non , nonfinere malos. Jugiez
icy pareillement en la maladie de l’ame, quand
le pechieur ne veillt venir à garifon par amandement
de fon méfait, c’eft mifericorde de lui contredire à cfej , ^ . ... ,
& fuppofé encore qu’il n’en acquift point fa felva- . s ’ils les reçoivent en g re , ou s’ils les meprifent fans
tion pour ce queferoit maulgré luy, fi en auroit il repentir, a leur horrible damnation.^ ^ ^
moins de damnation, comme Dieu fait grâce aux
mauvais pervers, qui ne fe veulent repentir, quand il
les fait mourir pluttoft, fans ce qu’ils accrôiflent toujours
-leur damnation. Il apparut ou déluge , 8c en
Sodome: Prenés garde à cet exemple, uneperfonne
ira par male voye de pis en pis, c’elt mifericorde de la
retraire du pis i Quelle aura une playe fort enracinée,
qui toujours ira en empirant, 8c pourriffant, c’eft mi-
fericorde de la retrenchier V t Corpus redimas , &c.
Et icy je prendrais trois doétrines par maniéré d’in-
ftruétion ou de confideration.
La première doctrine : Les maufeiébeurs , 8c
coupables doivent amer tous ceulx qui proflliivent
cette injure , & la réparation , comme ceulx qui
aiment leur felut , 8c qui ont d’eulx mifericorde
, ' 8c compaflion , 8c qui les aiment plus que
eux meftnes ne font : tAnftoteles y. Ccnveniens nul-
U &c. Ainfi le difoit & defiuoit le S. Prophète
: Corripiet me jttftus in mifericordia, Pf.CXL. f . Car
outre ce qui eftd it, vous veez, que fi des pieça on
euft repris , 8c puny leur méfait, jamais ne feùflènt
cheusen cettui-cy tantenorme, & publique, 8c de-
teftable. Nemo repente fit pejfimus , fient nec fummus.
Mais paravanture ils diront ic y , ou aucuns pour eux,
que on leur feroit plus grand grâce, 8c amour 8c mifericorde
, fe on leur pardonnoit tout le méfiait : je dis
que non, car on ne doit mie aimer plus fon prouchain,
ou fon ennemy, que foy meifmes ; il fouffit que on
l’aime autant que fo y , & j ’aymonftré que chafcun
par droit, 8t par raifon, doit vouloir que juftice fe
fiklTe, quand autrement ne fe peut le méfiait reparer,
comme eft icy. Car fe vous, Meffeigneurs, ou le Roy,
ou l’Univerfité , ou les bleffiez làifloient ainfy aller
cette befoigne, fans aultre réparation , que feroitcè
ce que enfuivroit de maulx, 8c de mefehief pour tous
ceulx 8c contre ceulx qui font advenir. Car la licence
8c la folle hardieffe de méfeire toûjours , de-
mourroit au cueur de plufieurs : Falicitas venia in-
centivum tribuit delinquendi. Mais aufli il doit bien
fouffire, que on foit autant mifericors comme Dieu,
La tierce doétrihe. Les coulpàbles fe doivent mieulx
raporter au jugement du R o y , 8c de fonConfeil,ou
de fa Cour de Parlement, que à eulx mefmes. La
caufe eft clere i car ils ne pourroient fi bien veoir
la maniéré de reparer ce qui eft malfait, comme aultres
plus faiges, 8c qui ne font point deceulx par trop
grand amour d’eulx , ne aveuglez en ce fait. En
bonne foy je. ne propofe icy ichofe que je ne vou-
' lifté faire en pareil mefeiéfc , s’il m’eftoit advenu felon
l’affeétion, que j’ay deprefent. A la par fin je
propofoye , que vous , Melfeigneurs , devez en ce
cas avoir mifericorde de vous mefmes, & de voftre
Roya lleCou r, qui eft Cour-de Juftice , 8c d’Equité.
Vous fçavés , que l’efta t, 8C la vie Civile de cette
Cour gift , & fe maintient par juftice , comme le
corps eft vivifié par l’ame : En tant donc, que juftice
eft blefiiée, ou violée , entant deflàült cette Ro-
yalle Cour , s’elle n’eft reparée. Vous devez donc
' garder juftice comme voftre v ie , car à ce eftes vous
ordonnez. Et s’àucun de vous difoit, que fbüventne
peut pour paour jufte , ou pour faveur : refpond le
Saige. JSfoti quarerefierijudex nifivirtute valeas irmmpcre
iniquitates. Eccli.vn.6. Fill ufquead mortem certapro ju(li-
tia. Eccl. IV. 33. Et Apoftolus. Nondumufi/uead fangui-
nem refiitifiis. Hebr. x i i . 4. De quibus Boetius. Tu
c]/toque f i vis. Se tu ne peux refifter aux 4. Tyrans,
qui veulent corrumpre fe juftice ; tu ne dois pas
feoir en Ion Trône. Ces Tyrans Ions les quatre pafilions.
joye , 6c douleur , efperance , 6c peur, des
quelles on pourroit faire un grand fermon, mais plufieurs.
Advifez, Melfeigneurs, levons laifiiez un tel
fourfeit fans punition, quelle playe mortelle fera à juftice
par tout le Royaulme ? Quelle juftice fe pourra
faire ailleurs, 6c en moindre fourfeit -, fe icy à Paris,
vous veans, 6c fçaehans, injuftice régné,- 6c domine,
6c oppritpejuftice, Magna fenefira ifcquitia. Regardez
, que vous ne foyes caufe de mil, 6c mil maulx,
de meurtres, de rapines, de trahifons, de larrecins,
de fecrileges, de raviflèmens de femmes, par tout le
Royaulme, fi vous ne cloiez bientoft, 6cdeligem-
6c non pas plus, ces feroit folle mifericorde. Pour- çtnent la voye à injuftice, qui jà tant eft ouverte. Et
tant dit noftre Seigneur apres les paraboles propofées $
Sicut Pater vefter coeleftis mifericors eft. Luc. vi. 36. Et
vous fçavés, que Dieu n’eft point tant mifericors qu’il
ne foit jufte -, Vniverfa via Domini mifericordia'& veritas.
Pf. xxiv. 1 o . perfonnes fingulieres ne peuvent donner
, au pardonner les injures publiques, 6c celles de
D ieu, 6c du Seigneur. Voire, mais dira aucun qu’il
n eft homme qui voufift eftre puni, ou afflitté , fi
ne doit faire à aultri ce qu’l ne vouldroit point qu’on
lui fift. Je répons , que ce qui eft ici propofé }• eft
faux , plufieurs font faiges 6c bons Chreftiens , qui
fouffrcntvoulentiers punition en ce monde pour eche-
ver la damnation de l’autre ; E t qui font amende de
tout leur pouvoir envers ceulx lefquels in ont injune
pourrés dire, que vous n’en avezcoulpe. On feult
dire en la rue de fevre que Abfentia nauta vel négligert-
tia, eft cauja fitbverfionis navis. Un marignier plonge
la n e f , quand il la lailfe périr pour l’heure , qu’il la
doit gouverner, 6c fauver. J’ay oiiy reciter d’un fege
fol, qui eftoit en la prefence du R oy, quand on luy de-
mandoit grâce pour un homme , qui avoit tué
un aultre. L e R o y répondit, que par plufieurs fois
il avoit fait femblable grâce à ceft homme 6c que
plus ne la feroit : lors lé fol dit au R o y , Sire vraye-
ment vous povez bien feire grâce à cet homme cy,
car il n’a pas tué l’autre. Pourquoy , dit le Roy?
6c qui ha ce fait doneques ? Je le vous diroye, refi-
pondit le f o l , fe vous n’en devrez eftre couroucié
Vous fçavez aufli que on ne parle mie en ce^nen ny, dit le Roy. Et je vous dis, Sire, que c’eft
Commandement de Dieu de ce que aucuns font 5 mais
de ce que on doit feire félon raifon. Orveult raifon,
que la juftice fc feffe des maufaiéfceurs.
La fécondé doélrine. Les coulpàbles de ce fourfeiét
doibvent de leur bon gré entant qu’ils ayment leurfab
vation poyer l’amende à juftice , 6c foy offrir à l’a-
mendie. Aultrement je ne voy point, comment
eulx puiffent eftre en l’ état de fe lu t, 6c comment
Preftre quelconque les pourroit abfoudre, veu lacir-
conftance du cas. E t non pas feulement doivent ceci
faire pour leurs perfonnes , mais doivent à ce mettre
vous qui l’avez tué : car fi vous euffiés en ça feic
juftice de c’eft homme icy , l’autre ne fuft point
mort. Vous enténdés bien , Meffeigneurs , a qui
va cette narration. Se juftice euft efté bien execu-
teé ou temps paffé, pais feuft maintenant avant
elle, 6c la vaifit, quia fruftusjuftitiapax. Ife.xxxn. 17.
Et juftitia & pax ofculata funt. Pf. LXXXiv. i i . Qui
habet aures audiendi audiat. Matt. xi. iy . Qui pot eft
capere capiat. Matt.xix. 12. A ce propos je porroyc
am mener. l ’exemple que recite l’autheur du livre,
qui fe nomme. De difeiplina Scholarium. Du fils qui
mor-
5 81 Querela, nomine XJmverfitatïs, ad Senatum Parifi e 8 2
mordit le nez à fonPere , quand on le menoit pen- auttes s’en teuffent, ou diflîmulaflent leurs ' '
dre, endifent Pere vous eftesceluy qui me pendez. Oar-
dés bien Melfeigneurs / que les fubjets du Royaùl-
me ne vous puiffent imputer leur. empirement en
ce monde 8c leur damnation en l ’aultre, pardef-
feult de les ‘mettre en Juftice , 6c à correétion.
C ’eft la mifericorde , que vous devez à?vous meifmes.
fuft par paour, ou par negligence, fuft par faveur,
ou corruption..;, Et cccy je, puis bien dire quelque
ternae j l paraift, fans peril de Irregulaa-itef Ce n’eft à
dire forfque vous faites votre devoir 6c fecourés à la
cj*°fe publique. Je ne tens point icy à la douleur, ou af-
fliéfciôiï dès colpables, pour ce qu’elle plaife; mais
Et cette mifericorde vous devez à cette Cour . pour êfehever pis , 6c‘ que les innocens vivent en
6c à fon honneur. Penfés que on dira par tout feA feurtè. Et fe l’enquefte doit eftre des injuftices ie
tel méfiait remaine impunis son dira que cette Cour
ne punit que les ,povres ^ 6c les. petits meffaits, ou
ceux qui*n’ont amis, oh qui né procèdent par voye,
de faits cprnme gens d’Eglife , Prélats , 6c autres ?
ils vous compareront à l’Epouventail de cheneviere,
qui ne fe remue point, 6c lors les oifeaux quand ils
apperçoivent cecy, né tiennent conte,.,6c,font leur,
fiente fur eux : ils amenront à , leurs propos le dit
d’un Philofbphe nommé Anarazes, Que les Droits &
les Loix font comme le toile de Paragne , qui retient
les petites moufehettes , mais- les großes pafient tout.
énquefte doit eftre des injuftices je
ad joute c e , puis que ce fait tant non pareil de aultres
demonftre que il n’eft.pas..feul, on que ce n’eft pas
le premier ; car cejferpit tropmal femblable que fouj
dainement aucuns fe donnaflènt à tel fourfeit. Je
m en raporte a vos haultes difcretions , 6c par cette
refpons pour quoy je n’ay nommé quelconque per-
fonne en particulier: Car les informations bien feit-
tes vous en pourront donner plus plainier cognoifi-
fences 6c defeendre à cette particularité appartient plus
a aultres que a un Théologien.
L a 2. Confideration. Ce Trône de juftice doit par
Je pourroyeïcy m’arrefter longuement à loiier ju fti-B foy meifmes trouver 6c d ia e f , ordonner, 6c conclure
ce , 6c condamner injuftice^par -les exemples des Ro^ les; maniées de repayer tous les fôurfeits deffus tou-
mains , _ 6c des Grecs 5 6c de fés feins qui n epar- chies en general, puis qu’on les aura attains en parti-
gnoient nez à leurs eqfens propres , comme Brutes, - culier 6c par noms efpeciaux à" les feire exequter.
6c aultres. Remembrés devant, vos^yeulx le Juge- Car fans exeqution , peu, ou néant vauroit tout le
ment que fift: Trajanus 1 Empereur a la çovre fem- demourant, mais pourroit grandement nuire $ 6c fe-
me, poui la quelle chofe il_en a efte fauve j félon ce roit l’entreprife plus perilleufe 6c plus dommaigeable
que on lit' en la vie de feint Grégoire. Ceft Empereur
-alloit en bataille 6c jà eftoit fur fon cheval : une
povre femme vint aut devant 6c lui demandoit juftice.
6c«honteufe. E t par ce je me pafte de former les
conclufions. Je m’en attens à ceux qui fçavent les
Droits, car je tiens, icy plus le lieu de prefeheur, que
Bonne femme , dit i l , tu vois mon empefcKe-
d’Advocat, ou Orateur-.
ment. Sire, dit elle , Je ne vous demande fors ce
L a 3. Confideration. Cette Cour 6c Trône de juftice
que vous me devez. Bonne femme, je te feray juftice
doit feire briefve expedition 6c exeçution de cette
au retour. V o ire , Sire, 6c fi vous’ne retournez.
befbignè, pour le peril 6c dommaige trop grand qui
eft en fe demeure. Penfez quantes âmes demandent
le pain de doétrine 6c de meditation, 6c nuis ne leur ad-
— ~ j — « miniftrent. Je pourroye udeemmoonnfmtreerr ccoommmmeenntt lfee
te fauvera ponit, Semiramis, Seleucus oculumalterglo- '“"tourne au préjudice non pas feulement des vifs,mais
i circumdas.
En lieu de Conclùfions je prendray trois Confédérations
Mon fücceffeur, dit Trajanus,. te fera droit. Et la
femme luy demanda, quel mérité il en avoit, fe un
aultre lur feifoit bien : la juftice d’aultrui dit elle ne
pour refpondre à ce que on me poun*oit
oppoler, que je ne nomme les maufeiéleurs , 6c ne
dis point quelle amende je requiers. L a 1. Confideration.
Ce Trône de la juftice Royallc ou repofe
fon authorité, ce Sénat desPeres confcripts, doit de
fon office feire enquefte diligemment, 6c conftam-
ment fans fléchir 8c fens riens épargner pour attain-
dre tout ce feit au v if de la vérité, fuppofé que tous
de tous les morts j combien qu’en foit moins mal
ceffer par aucun temps pour feurtè , 6c cheoir tan-
toft a totale perdition. Penfez aufly q.ue toujours vole
la renommée de ce méfait. Sy doit enfemble courir
la renommmée de fe réparation, ou aultrement le
deshonneur eft fans honneur. Par ce appert que diligence
n’en ha efté faite 6c que les maufeiteurs , qui-
doivent eftre tefmoins-font fuitifs prez du Royaub
me 6c ont efté veus depuis.
Tomi IV % Pars II.
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Oo 2 JOAN