
manière remarquable dans les animaux-, & s’y
trouve jointe à une autre propriété qui en efb très-
.diftinéle, & qu’on nomme fenfibiVté. Auffi, n’eft-il
pas vrai de dire, comme on l’a avancé depuis peii,
que l’ irritabilité n’eft que la fenfibilité mariifeftée
.parle mouvement. Î1 n’eft pas non plus exaô dé
prétendre que plus l’organifation eft parfaite dans
les différentes parties dès Animaux , plus lés lignes
à'irritabilité y font fenfibles-. -
Premièrement , dans les animaux, les parties
dans lesquelles l'irritabilité ïe manifefte delà maniéré
la plus marquée , comme le.coeur , les mu£■
cles., &c. font les moins nerveufes , & par eorifé-
quent les moins fenfibles y. aânfi cette feule cohfi-
>r/v '°n ’ Pr0uve 4ue Ie fiége de l'irritabilité
n eït pas le même que celui dé la fenfibilité, füffit
pour démontrer que cçs deux facùkés font diftïn-
gué-es 1 une-, de i’autre , & même indépendantes.
's,j'econdem.ènt, on peut- prouver que plus on
s éloigné des animaux parfaits, c ’eft-à-riirede ceux .
en qui l’animalifâtion ;eft la plus complète dans
toutes les facultés , plusda fenfibiHté paroît diminuer
, 8c même s’anihfter , pour ainfi dire -" &
cependant l’irritabilité, dans cés>êtres , bien loin
d etre diminuée, femble au contraire y augmenter
d’intenfité à mefure que la fenfibilité y paroît
affaiblie. - - . r
La fenfibilité eft exquife dans l’homme & les
quadrupèdes -, elle pamît fort diminuée dans les
poilTons 8c les reptiles ; cette diminution de la
lenfibilité eft plus apparenté encore dans les infectes
, & fur-tout dans les vers. -Cependant les animaux
qui compofent ces derniers ordrés font tous
doués d’une irritabilitétrès-remarqüable ; & plu-
fieurs faits connus indiquent que cette faculté a~
plus d’étendue dans les êtres dont il s’a g it, que
dans ceux que l’on regarde comme, plus parfaits. I
Virritabilité des mufcles dans l’homme & les quadrupèdes
ne fubfifte guères au-delà d’une heure ou
a une heure 8c demie 2près la mort de ces êtres
je veux dire après la ceffation parfaire de la circulation
de leurs fluides. Il eft cependant conftaté *
par 1 expérience , qu une grenouille éventrée , 8c
dont on a fcparé-du corps les principaux vifeères
donne dans ces vifeères , tels que le coeur &c.
des Agnes fenfibles: i rritabilité , plus de vingt
heures après leur extraélion du corps. On peut
çbièrver le même phénomène fur la vipère & fans
doute fur beaucoup d’autres animaux analogues,
c’eft à-dire du même-ordre. C’eft à l’intenfité de
cette faculté que font dus cés mouvehilns affez
long-temps perpétues dans les portions d’une anguille
que l’on a coupée par morceaux..-^ chien
coupé- en pièces comme cetre anguille, n’offriroit
pas de femblables mouvemens.
L'irritabilité, qui fe rend f i remarquable dans
les animaux les moins parfaits . & qui femble
prefque y domine^, & même à la fin fuppléerla
fenfibilité , fe retrouve encore dans un grand
nombre de végétaux ; tandis qu’il eft de toute J
vraifemblance que la fenfibilité n’y-a plus lieu eti
aucune manière.-Mais cette irritabilité, qu'rné
s’y manifefte que dans .des circonftancès toujours
les mêmes, y eft due'^ félon nous7 à une caufe
entièrement méchanique ; c’eft au moins ce que
nous penlons des mouvemens inftantanés'qui s’ob*
fervent dans les parties du port des plantes.
En effet, nous croyons que les utriculès du tilfu
des végétaux le rempliflent, principalement dans
les temps chauds & pendant Pinl|uence de la
lumière , d’un fluide particulier très-làj^til'j.produit
par les déperditions qu’éprouvé leur fübftanéè par
l’aâion de la- vie ; & que le fluide particulier ainfî
amafie, occafionne dans certaines parties une ten-
fion qui fe trouve oppofée à l’effet de la contraction
naturelle des fibres de ces parties. Dé-là lé
redréffement 8c l’expanfion des feuilles , le déploiement
de leurs folioles, l’épanouiffement des fleurs,
8cc. Mais lorfque par les fuites du contaft d’un
• corps quelconque , ou d’uneprivation confidérablé
de lumière , le fluide lubtiie dont nous venons dé
faire mention , vient à fe dilfiper, la tenfion particulière
de^ la partie du végétal qui contenoit ce
fluide ne fubfifte plus, & fur-le-c'hamp la con-
traâion naturelle des fibres du végétal fe fait librement
, J$c opère un raccourciflement qui donne
lieu au mouvement de plication dés feuilles dont
les folioles fe ferment alors, & au reflerrement
des corolles.
Cesfaits font aflez- connus , 8c l’on fait que le
le mouvement de plication , de baiffement ou de
refferrement des feuilles, fe fait avec promptitude
dans certaines plantes qu’on nomme par cette
raifon Jènfitives ; 8c que, fa'ns être nul, cè mouvement
s’exécute avec lenteur dans beaucoup d’autres
, qui par-là paroiffent moinsfenfibles ou plutôt
moiQs irritables , mais dont néanmoins les feuilles
& lès fleurs le ferment & s'ouvrent périodiquement
aux mêmes heures ou dans les mêmes cir-
confiances. Linné en a pris occafion d’établir ce
qu’ il nomme Sommeil des plantes , & VHorloge
dè Flore. ;
On peut voir dans ce Diéiiônnaire, à l’article
Acacie ( Vol. 1 .) , efpèce n°. 36 , notre opinion
fur l'a caufe des mouvemens curieux obfervés dans
la fenfitive. C’eft.à la même caufe qu’il faut rapporter
l'irritabilité de plufiejurs autres Acacîës , de
la Dionée , de l ’Oxalide fenfitiyp } & même de
l'Redyfarum tyrans (efpèce de Sainfoin ) , avec
cette diférence que dans’cette dernière plante, le
fluide fubtile qui s’y produit continuellement pendant
les temps chauds , s’amaffe & fe diffipe alternativement
8c fucceflivement dans les parties de
cette plante ( les folioles de fes feuilles , fur-tout
les deux-latérales ) qui offrent par cette caûfe des
mouvemens d’ofcillation alternatifs & fucceflifs.
Peut-être que les m o u v em e n s particuliers ob-
fervés dans les organes fexuels des plantes font dus
anfli à une caufe analogue à celle dont n o u s venons
de traiter, mais qui eft modifiée ou déterminée!
par un certain état de développement de ces parties
8c par leur conformation. Cependant les mouvemens
dont il s’agit font fi finguliers 8c fi variés ,
que nous n’ofons pononcer pofitivement fur leur
caufe déterminante.
Au refte , pour faire bien connoître lesmotive-
mens curieux dont il eft queftion, nous ne farinons
mieux faire que de tranferire ici dans fon
entier le Mémoire intéreffant que M. Desfontaines
, de l’Académie desSciences, 8c Profeffeur
de Botanique au Jardin du Roi, a préfenté à l’Académie
en 1782.
M É M O I R E
■ Sur l'irritabilité des organes fexuels d'un grand
nombre de Plantes »
Par M. D esfontaines.
te On appelle irritabilité la propriété que la nature
a donné à certains corps de fe mouvoir d’eux-
mêmes , principalement lorfqu’on les touche. Cette
force centraétile qui nous offre dans les animaux
des phénomènes fi étonnans & fi variés, n’eft
point, comme on le croit communément, un attribut
particulier. qui les diftihgue.Un grand nombre
de plantes donnent auffi _de,s figtîes d’irrifation
plus ou moins fenfibles , félon leur â g e , leur
vigueur, la partie qu’on touche ou qu’on irrite.
Divers Auteurs en avoient déjà obfervé dans les
feuilles & dans les corolles de plufieurs plantes.
M. Duhamel a décrit avec beaucoup d’exaélitudé
les mouvemens curieux de "la fenfitive, connus
depuis bien des fiècles. M. Bonnet, dans fes recherches
fur l’ufage des feuilles , a prouvé qu’elles fe
mouvoient d’elles-mêmes, qu’ellës préfentoient
toujours leur furface à l’air libre , & qu’on ne
fauroit déplacer les branches d’un arbre fans faire
prendre aux feuilles de nouvelles pofitions. Lin-
nceus a encore pouffé plus loin fes recherches fur
le même fujet : ce Naturalifte célèbre a fait connoître
les mouvemens journaliers des feuilles d’un
nombre fle plantes très-confidérable dans une dif-
fertation intitulée Somnus plantarum, & il a
prouvé qu’ils étoient indépendans de l’état de
l’atmofphère. Le même Auteur, après-avoir obfervé
qu’une grande quantité de fleurs s’oiivroient
affez régulièrement à certaines heures du jour , a
conçu l’idée auffi agréable qu’ingénieufe , d’en
faire une efpèce d’Horloge , qu'il a nommée Horloge
de Flore, Horologium Flores. On fait que
l’extrémité des feuilles de la Dioncea mufcipula
s ouvre en deuxvalves à peu près comme un piège,
& qu’elles fe ferment fubitement lorfqu’on y excite
une légère irritation. Enfin , celles de l ’Hedyfarum
gyrans , efpèce de Sainfoin , rapportée depuis
quelques années des bords du Gange , & dont
M. Brouffonnet a donné la defeription dans les
Mémoires de l’Académie de 1784 , préfentent
encore un phénomène plus étonnant ; elles s’élèvent
8c s’abaiffent alternativement pendant quelques
heures.
Ces divers mouvemens des feuilles & des pétales
, de mime que ceux que nous allons faire
connoître dans les parties foxuclles , nous parpif-
lcnt tenir- effentieiiement à l’organifation. particulière
des plantes, à fournie propre. Lesloixphy-
fiques & méchaniqu.es connues n’en rendront
jamais mieux raifon qtie de l’aéliorunufculaire des
animaux , parce qu’ils dépendent fans doute de
cailles analogues, & qui nous feront inconnues à
jamais»
Si les mouvemens contraâiies des feui!îes~& des
corolles ont été obfervés 8c décrits avec foin il
n’en eft pas ainft de ceux qui fepaffent dans les
organes fexuels au moment de la fécondation. On
me les a voit reconnus jufqu’à ce jour que dans
l’Epine-vinette, Berberis .vulgaris , L. le Cactus
opuntia, L. le Ciflüs helianthemum ,T. & quelques
autres efpèces dont il eft fait mention dans une
differtation des Amoenit. Acad, intitulée : Sdoiî-
Jalia Plantarum. C’eft néanmoins dans ces mêmes
organes que Y Irritabilitéparoît fe manifefter d’une
manière plus univerfelle & même plus marquée
que dans aucune autre. Nous allons établir cette
vérité en expofanr les obfervations que nous avons
faites fur les lexes d’un très-grand nombre de plantes.
Nous traiterons d’abord des mouvemens des
étamines, puis nous ferons mention de ceux que
nous avons décou verts dans les ftyles 8c même
dans quelques ftigtnates.
Des mouvemens des étamines.
Les anthères de plufieurs efpèces de Lys, avant
de s’ouvrir, font fixées le long des filets parallèlement
au ftyle dont elles_font éloignées d’environ
cinq à fix lignes. Dès i’inftant ou les pouffières
commencent à fortirdês loges, ces mêmes anthères
deviennent mobiles fur l’extrémité des filets qui les
foutiennent, elles s’approchent fenfiblemént du
•ftigmatel’une après l’autre, & s’en éloignent pref
qu’auflitôt qu’elles, ont.répandu leur pouffière fécondante
fur cet organe. Ces mouvemens s’obfer-
vent très-bien dans le Lilium fuperbum. L.
Les- étamines de Y Amaryllis formofijfîma. L.
celles du Pancratium maritimum.L. 8c du Pancra-
tium Illiricurh. L. nous préfentent un phénomène
très-curieux & un peu différent de celui que nous
venons de, rapporter : les anthères de ces plantes ,
avant la fécondation, font, comme celles des Lys,
fixées le long de leurs file ts, .parallèlement au
ftyle ; dès que les loges commencent à s’ouvrir
elles prennent une fît nation horizontale , & elles
tournent quelquefois fur l’extrémité du filet comme
fur un-pivot , pour préfenter au ftigmate le point
par où les pouffières fécondantes commencent à
s’échapper.
Si nous obfervons attentivement les étamines