Au p rem ie r étage, au-dessus du mandarah, on trouve quelquefois une autre
pièce absolument semblable, mais plus richement ornée qui sert plus p a rticu liè
rem en t de salon aux femmes. Cette pièce, appelée Qaah3 ressemble au mandarah.
Elle est également décorée de riches souffehs où l’on étalait autrefois la vaisselle
d’apparat, les vases de Chine, les gargoulettes de l’Inde en touli, damasquinées
d’argent, e t les v e rre rie s égyptiennes.
Le dorqâah, pavé avec luxe, n ’a ni bassin ni je t d ’eau. Le plafond, au-
dessus du dorqâah qui sépare les liwâns, est un peu plus élevé que les deux
autre s e t percé au centre d’une lanterne, appelée Memraq, qui supporte une
petite coupole e t donne au ta n t de lumière que de fraîcheur.
Les deux parties de cette v aste pièce sont décorées différemment; celle qui
est u n peu plus grande que l ’a u tre , est la plus richement ornée. Le bois joue le
principal rôle d a n s.le u r décoration ; il est soigneusement sculpté dans les plafonds,
découpé à jo u r autour des niches e t des tablettes, bardé de fines moulure
s dans les compartiments des portes et des armoires, incrusté souvent
d ’écaille e t d’ivoire et, enfin, tourné e t assemblé artistement dans les moucharabyeh
e t dans les grillages qui remplacent les fenêtres.
Toutes ces maisons fournissent de précieux détails de menuiserie intérieure.
Ce qui donne su rto u t aux habitations égyptiennes u n caractère fort original,
ce sont les immenses Moucharabyeh qui saillissent en encorbellement su r la rue
ou dans l’in té rieu r de la cour. Dans les vieux qua rtie rs, on rencontre à chaque
maison nos avant-soliers e t nos encorbellements du moyen âge, e t l’on est
toujours étonné de leu r élégante variété. (Pl. CXXXIV.)
Anciennement les moucharabyeh étaient uniquement, comme l ’étymologie
du nom l ’in d iq u e 1, de petites niches saillantes ou de simples grillages destinés
à p o rte r les vases réfrigérants, qu’on exposait dans un courant d’a ir. Trouvant
la place agréable, 011 leu r donna plus d ’extension p our y m e ttre u n petit divan
et y re sp ire r l’a ir frais sans ê tre vu. Peu à peu ils ont p ris une grande importance
e t sont devenus la partie la plus remarquable des habitations du
Kaire.
Les moucharabyeh sont souvent surmontés de fenêtres à vitraux coloriés,
rep ré sen tan t des bouquets de fleurs, des paons ou des arabesques capricieuses,
qui d iap ren t les in té rieu rs de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel. Ces vitrages,
qui portent le nom de Qamarieh3 ont de 50 à 70 centimètres de la rg e u r ‘sur
■I. Moucharabyeh vient de Charaba, boire, et'signifie place pour boire. On voit par cette étymologie
combien le nom qu’on a récemment adopté pour certaines parties des fortifications du moyen âge est absurde.
70 à 80 de hauteur. Ils sont composés de petits morceaux de ve rre s de couleur,
enchâssés quelquefois dans des meneaux de bois, finement découpés, mais plus
fréquemment dans une arabesque de plâtre entourée d’un cadre de bois peint.
La partie opposée aux moucharabyeh, dans les pièces supérieures, est
garnie d’une suite d’armoires, dont les portes sont assemblées à compartiments
variés e t qui sont flanquées et surmontées de p e tite s niches festonnées. Au-
dessus, règne un.e longue console garnie d’une bordure découpée de nierions,
où l’on plaçait aussi des vases de l ’Inde ou de la Chine.
Les quatre murs e t les recoins de ces vastes pièces, au rez-de-chaussée
comme au premier étage, sont lambrissés de h au t en bas avec des carre au x de
faïence, disposés en panneaux et encadrés p a r des bordures de même matière.
Le bleu y domine, e t s’allie avec la do ru re des plafonds d ’une manière ravissante.
Les grandes pièces sont généralement très-élevées, afin d’o btenir beaucoup
de fraîcheur, et souvent les chambres qui les flanquent sont de moitié moins
hautes, pour former deux étages au lieu d ’un ou p our avoir la facilité de p ercer
une fenêtre au nord, afin d’établir u n courant d’à ir. On retrouve encore cette
disposition dans les mosquées construites â p a rtir du xve siècle de n o tre ère.
Aujourd’hui, pour a érer les appartements, on construit au sommet de l ’habitation
un large appentis de bois (fig. 49 e t 20), nommé Malqa[3 espèce de ventilateur
dirigé au nord ou au nord-ouest, afin d’amener dans u n corridor les
brises fraîches qui soufflent de ce côté. L’usage de cet immense auvent commence
à tomber en désuétude à cause des maladies que ce courant d ’a ir
occasionne fréquemment.
Les salles supérieures, su r les côtés, sont généralement flanquées d’un
second étage, e t p ré sen ten t souvent, en face du mur du fond où se trouve le
divan, une petite pièce décorée d ’une suite d’arcades de bois festonné, où les
femmes pren n en t place lors de c ertaines cérémonies ou bien dans lesquelles, les
jours de fête, on m et des musiciennes e t des chanteuses. Cette pièce a toujours
un e entrée séparée.
Les plafonds des pièces principales sont décorés avec une richesse e t un
goût étonnants. Les solives et les entrevous sont sculptés, puis coloriés et
dorés, avec une finesse qui le cède à peine aux b eaux frontispices des manuscrits
orientaux. Les artistes arabes semblent y avoir suivi tous les caprices de le u r
brillante imagination, ne pouvant y rep ré sen te r leurs rêves dans un ciel peuplé
de houris. Les plafonds, au-dessus des dorqâah, sont généralement trè s-rich e s
e t souvent surmontés d’une coupole.