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 puis  puissants.  En  1119  (1707),  une  querelle  opiniâtre  é tant  survenue  entre  
 Qâssem-Ayouaz, le cheikh-el-beled et l’émir Zou-él-Fiqar, on  en  vint  aux mains.  
 Les  deux  partis,  qui  s’appelaient  du  nom  de  leurs  c h e fs ,  Qassmyéh  et  Zou-el-  
 Fiqarieh,   se  re n d ire n t  dans  une  plaine  aux portes du Kaire nommée Qoublet-el-  
 Azab,  au  delà  de  Bab-el-Nasr,  e t  commencèrent  u n e   lutte  qui  dura  plus  dé  
 quatre-vingts jours,  du lever au coucher  du  soleil. On se battait braverhent,  sans  
 se  ménager;  sitôt  la  n u it venue,  on  sonnait  la  re tra ite   ou  l’a rm istic e,  èt  les  
 deux p a rtis  ren tra ien t  au  Kaire  p a r  des  chemins  différents,  emportant  leurs  
 blessés,  les  morts  e t  les  épaves.  Cette  lutte  se  prolongea  ainsi  près  de  trois  
 mois,  sans  que  la  tranquillité  publique  en  fût  troublée ;  c’était  précisément un  
 des  buts qu ’ils  avaient  voulu  atteindre  en  choisissant  ce  champ  de  bataillé  
 désert  p our vider  le u r différend.  Les  conventions  de  ce  duel  collectif  furent  si  
 bien  observées  que  les  deux  p a rtis ,  rentrés  dans  la  capitale,  buvaient  dans  le  
 môme  lieu public.  Le  combat ne  finit  que  p a r  la m ort d’un des  deux Chefs,  qui  
 fut  vivement  regre tté .  Z o u - e l-F iq a r  était  resté  vainqueur;  mais  telle  était  
 l ’affection  de  ses  collègues  p our Qâssem-Ayouaz,  qu’ils  nommèrent  à  la  'dignité  
 paternelle  de  cheik-el-beled  son  fils,  quoique  bien jeune  encore. 
 Ismayl-Bey  se  trouva digne  du  choix  des  m amlouks,  e t  montra  l’intelligence, 
   la   sagacité  e t la  prudence  de  l’âge m ûr.  Il  se  créa  bientôt  au  Kaire  une  
 grande  popularité  e t y  gouverna  sans  rival.  Il  m ourut  cependant  assassiné  par  
 u n   jeune mamlouk  de  la maison  de  Zou-el-Fiqar  qui  lui  réclamait  une  petite  
 p ro p riété, et dont on avait attisé  la haine en lui p romettant les  biens  et le  harem  
 de  sa victime.  Ismaïl  tomba  frappé  d’un  coup  de  poignard  l ’an  1136  (172h).  Il  
 fut inhumé dans  le  tombeau de  son  p è re ,  situé  près  de  Bab-el-Louq.  Le  meurtrie 
 r  eut  les biens  et le  harem  du  défunt,  e t  ouvrit  la  porte  à  toutes  les  ambitions  
 de bas  étage. 
 Ismayl  avait  fait bâtir  à  Souq-el-Nasr une  sibylleli. 
 A  la  suite  de  cette  catastrophe  survinrent  les  troubles  et  l’anarchie.  Pendant  
 plusieurs jo u rs la capitale fut  à  feu  et  à sang, e t plusieurs beys  furent  tué s;  
 d ’autres,  s’élevant  su r  leurs  cadavres,  cherchè rent  à  se  frayer  un   chemin  à  la  
 fortune.  Les massacres, les  révolutions,  les  rivalités  ne  s’a rrê tè ren t môme  pas  
 devant la fameuse peste  de  kaouj  ainsi nommée  du  c ri d’alarme  d’un  fakir nègre  
 qui p arcourait  les  rues  du  Kaire  en  criant  kaou!  kaou!  (brûlure)  :  1143  (1731). 
 Mais  l ’in té rê t  commence  à  ren a ître   avec  Ibrahym  q ui,  s’é tant  fait  un  parti  
 nombreux en p laçant les esclaves de sa maison aux p remiers postes,  afficha ouvertement  
 la  révolte,  tout  en  ne pren an t que  le titre   modeste de  cheick-el-Beled. 
 Enfin  l ’an  1180  de  l’hégire  (1766),  Àly-Bey,  mamlouk  doué  d’une  ra re   
 audace  e t  d’un   génie  supérieur,  fut  revêtu  de  cette d ig n ité ;  osant  plus  encore,  
 il  prétendit  à  une  indépendance  absolue.  Il  se  défît  peu  à peu  de  ses  rivaux,  
 s’entoura  d ’amis dévoués,  gagna  le  coeur  du  peuple et  essaya de  secouer  le  joug  
 de la P orte.  Il  aspirait à la  souveraineté de l ’Égypte  e t il  y serait parvenu  sans  la  
 trahison  de son  favori, Mohammed-Bey,  qui se  déclara  contre lui  e t le  combattit  
 avec  succès.  La h ardiesse  de ses projets  lui  fit un  nom  en Orient  e t  fixa  quelque  
 temps  les  regards  de l ’Europe  su r  lui. 
 M ou rad et  Ibrahym Beys,  qui  ap p aru ren t après  lui  su r  la  scène,  semblaient  
 s’être  partagé  son  autorité  et poursuivre  le même  projet d ’indépendance.  Sans  
 l’expédition  française  nul  ne p eu t dire  quel  eû t  été  le  ré su lta t de  la  prudence  
 rusée  de  l ’un  e t  du  courage  indomptable  de  l’au tre .  Malgré  nos  efforts,  cette  
 célèbre  expédition  n ’eut point p our  nous  les  résultats  qu’on  en  espérait,  mais  
 elle  p ré p a ra   le  règne  de  Méhémet-Aly  et  la   régénération  de  l ’Egypte;  aussi,  
 quoique  la  France  n ’ait  tiré  de  cette  aventureuse  odyssée,  de  cette  belle  conquête, 
   d ’au tre   fru it  que  la  publication  du  magnifique  ouvrage  qui  a pour  titre  
 Description  de  t’Êgyptc,  elle n ’en  a  pas moins  ajouté un   fleuron  de  plus  à  sa  glorieuse  
 couronne.