Mohammed-ben-Ahmed, qui v in t gouverner à sa place en i0&7 (1637), e t la
p lupa rt de ceux qui le suivirent, furent aussi avides que leurs prédécesseurs;
ils continuèrent le u r système d ’accaparement des successions, re tin ren t à leu r
profit les pensions qu’on payait aux veuves e t aux o rp h e lin s, pre ssu rè ren t le
peuple e t commirent toutes sortes d’exactions.
Le pachalik d’Égypte é ta it devenu un e charge vénale qu’on achetait au
divan de la Porte un c erta in nombre de b o u rs e s , e t dont on s’empressait *de
ré a liser les énormes bénéfices p a r les moyens les plus h o n te u x , nul n’étant
assuré de la durée de son emploi. Ce sont ces tenanciers de p a ch a lik , ignobles
e t incapables, toujours sous le coup d’une brusque révocation, qui cherchaient
p a r tous les moyens à faire rapidement fortune et à ê tre à même de payer le u r
trib u t annuel à la P o rte; presque tous hauts fonctionnaires sans intelligence,
constamment en tutelle, aux ordres des beys (chefs de milice) et surtout du
Cheikh-el-Belcd, le plus puissant d ’en tre les mamlouks. Tant que ces pachas
siègent à la citadelle, ils signent les pièces q u ’on le u r pré s en te , ordonnent
ce qu’on exige d’eux, pactisent to u r à to u r avec les maîtres du moment, e t se
ré signent à cette vié de condescendance, de vol e t de lâ ch eté , jusqu’à' ce qu’ils
a ient fait le u r tem p s ; puis, dociles jusqu’à la fin, ils se livrent à la P o r té , qui
les d ép o u ille , les exile ou les é tra n g le , suivant les circonstances e t selon le
bon plaisir du divan, des eunuques ou des janissaires.
Depuis cette époque ju sq u ’à la fin du xvne siècle (1112 de l ’h é g ire ), l’influence
des beys grandit de jo u r en jo u r; aussi le gouverneur turlc n ’eut-il plus
d ’importance politique ni grande autorité su r l ’administration.
Il serait donc superflu de faire la liste dés pachas qui se succédèrent en
Égypte ; les faits et gestes de ces agents de la Porte n ’offrent d ’ailleurs aucun
in té rê t sous le rap p o rt de l’a rt e t de l’histoire particulière du pays.
Nous ferons rem a rq u e r que la nouvelle race des mamlouks qui succéda
aux Turkomans ou Baharites, ainsi qu’aux Circassiens ou Borgites, n ’était
plus cette race superbe qui e.ut l’honneur de donner des soultans à l ’Égypte;
elle n ’offrait aucune ressemblance avec cette généreuse milice qui oubliait Ses
haines e t son ambition pour se ra llie r au to u r de ses chefs et co u rir avec eux au-
devant de Pennemi. C’était une soldatesque in solente, rapace et lâche, que
l’appât d ’un peu d’o r ou d’u n emploi subalterne poussait à tous les excès; on
a ttrib u a it spécialement à cette troisième race le nom de Ghozzes, parce que les
prem ie rs de ces esclaves avaient été achetés dans le pays des Uzzes ou Ghozzes
I. G h u z z bu Gh o zz, connus des Grecs e t des Latins sous le nom de Oze s, et des Russes ou des Polo-
On leu r donnait aussi le nom de mamlouks-beys, parce que les b e y s , le plus
haut grade auquel ils pussent parvenir, é taient pris parmi eux. Observons ici
que le nom des mamlouks des premières d y n a sties , qui ont fait de si grandes
choses, est encore en h onneur en Égypte, tandis que le nom des. Ghozzes est
p a rtout en exécration. D’ailleurs, p our ra conte r cette triste h is to ire , les documents
feraient défaut; en o u tre , les événements qui se sont succédé depuis la
conquête de Selym semblent dénués d ’in té rê t p o u r to u t le monde,. Tout ce qu ’on
peut en conclure, c?est que l ’Égypte fut abâtardie, épuisée e t façonnée au joug.
Les beys, manquant d ’appui, se renfe rmè rent pendant plus de deux siècles dans
les bornes du devoir; le u r rôle se borna à sauvegarder des invasions des A rabes
le pachalik, divisé en vingt-quatre étendards ou départements, et gouverné par
autant, de beys mamlouks.
Puis, peu à peu, les esclaves que les beys avaient introduits dans le corps
des janissaires d e v en a it plus nombreux e t les instruments: dociles de leurs
maîtres, des troubles commencèrent; les gouverneurs abandonnèrent le u r province,
et, se reposant su r leurs lieutenants ou kâchefs du fardeau des affaires,
ils vinrent siéger dans la capitale, où ils formèrent un divan. Ces beys é taient
à la nomination du pacha ; ils commandaient à des soldats d ’un des sept corps
qui composaient alors les armées ottomanes; mais, comme ils ne trouvaient pas
dans leurs soldats des instruments assez dociles, ils firent recevoir leurs esclaves
dans le corps des janissaires et se c ré èren t ainsi une grande autorité militaire
dont ils usaient pour pa rvenir au poste le plus élevé sous la domination ottomane,;
le cheikh-beledah ou gouvernement du Kaire. Cette charge donnait la p rimauté
su r les commandants des autres étendards. Quand u n bey était nommé
cheikh-el-beled, ses collègues e t ses anciens camarades faisaient cause commune
contre lui, e t pa rvenaient presque toujours à le renve rser.
Les pachas n ’étaient pas plus tranquilles dans le u r charge; les beys les
dénonçaient à la Porte, e t s’ils n ’obtenaient pas la destitution de l ’homme qui
leur déplaisait, ils recouraient aux armes et le chassaient d ’Égypte. Les pachas
furent contraints, p our se maintenir, de semer la discorde et, litté ra lem en t, de
diviser pour régner. Telle é ta it, en peu de mots, la forme du gouvernement
sous la Porte ottomane.
Une pa rticula rité remarquable et qu’il faut signaler, c’est la lu tte à main
nais sous celui de Polovlzes, avaient acquis une puissance formidable dans le pays situé entre le Volga et le
Danube; ils en partirentpoür ènvàhir le Khorâssân en 4034 de l’ère. chrétienne ; én 4050, ils entrèrent en
Mésopotamie e t s’emparèrent de Mossouî; mais le khalife les força de se re tirer dans les montagnes d’Azerbaïdjan
ou Médiei