s eu r égalait celle d’une meule de moulin, de façon que chacun de ces énormes
lingots suffit pour la charge d’un chameau.
La présence du khalife donna une nouvelle activité aux travaux; le sol de la
ville nouvelle se couvrit p a rto u t de constructions; et cette même année Djouh
a r, devenu le p rem ie r vizir du khalife, je ta les fondements de la célèbre mosquée,
nommée Gama El-Azhar, (la mosquée des Fleurs), probablement par allib-
sion au surnom de Zahorah (fleurie) que portait Fatime, fille du Prophète, de
laquelle le khalife Moez-le-Din-lIIah prétendait descendre.
Cette mosquée, la plus ancienne du Kaire après celle de Touloun, est encore
une des plus remarquables p a r son étendue, sa magnificence e t l ’importance
des fondations pieuses faites en sa faveur; elle porté encore maintenant le nom
de la Grande-Mosquée et est, pour ainsi dire, la cathédrale de la ville.
Djouhar voulut faire de cet établissement un véritable témoignage de la
munificence royale, il l ’avait doté d ’une riche bibliothèque, e t y avait fondé un
collège qui devint bientôt le siège de l ’université la plus célèbre et la plus florissante
de tout l’Orient. Des professeurs, entretenus su r les revenus assignés à la
mosquée, y enseignaient toutes les sciences cultivées alors par les Arabesj c’est-
à-dire : la grammaire, la littérature, la théologie, la jurisprudence, la médecine,
l’astronomie, les mathématiques e t l'histoire. Bientôt l ’affluence fut si grande
qu’on y pouvait compter plus dé douze mille étudiants, venus de tous les points
du globe.
Le khalife fatimite Moez-le-Din-IUah mo u ru t au Kaire l’an 365 de l’hégire
(975 de l ’ère vulgaire), e t y fu t inhumé auprès de ses ancêtres dont il y avait
fait tran sp o rte r les dépouilles mortelles; après lui, sa dynastie, maîtresse de
l ’Égypte e t de la Syrie, „maintint le.siège du khalifat fatimite au Kaire, pendant
que les khalifes abbassides continuaient à ré sid er à Baghdad;.mais en l ’année 564
de l’hégire (1169 de l ’ère c h r é t i e n n || elle fut dépossédée à son tour et remplacée
p a r la dynastie des Ayoubites. Nous ne croyons pas utile de nous appesan
tir davantage su r les détails historiques qui la concernent, quoique le mouvement
des croisades se soit produit de son temps; une digression de cette
n a tu re , fût-elle intéressante, diminuerait sans nécessité l’espace déjà bien restre
in t qu’il nous est permis de consacrer à n o tre thèse artistique.
CHAPITRE III
P R O L É G O M È N E S H I S T O R IQ U E S
2“ P É R IO D E .— L E S MAMLOUKS
I o D Y N A S T IE D E S SO U L TA N S A Y O U B IT E S .
Sous le khalifat d ’Adhed-le-Din-Illah, Nour-Eddin é tant atabek ou gouverneur
de Syrie, Youssouf (il était neveu de ce Chirkoueh, que ce khalife fatimite
avait, après sa victoire su r Amaury, comblé d’honneurs et auquel il avait confié
à la fois le commandement de l’armée et le poste de premier vizir) fut revêtu, à
la mort de son oncle, de la charge du vizirat.
Dévoré d’ambition, le nouveau vizir d ’Adhed conçut le proje t de déposséder
le confiant khalife; mais, profitant des divisions qui existaient entre les Fatimites
e t les Abbassides, il colora ses desseins perfides du prétexte de restituer le trône
à l’autorité des descendants d’Abbas, afin de ren d re moins odieuses Fingratitude
et la trahison qui lu i ouvraient le chemin du trône. Youssouf s’empara donc
du pouvoir, déposa son maître e t re çu t le nom pompeux de Salah-el-Din1
(569 = 1173).
Avec lui commence la dynastie des soultans ayoubites (du nom d ’Ayoub, père
de l ’usurpateur), dynastie qui régna quatre-vingt-cinq ans, sous dix soultans.
4. Les princes musulmans ont toujours divers surnoms ou titres ajoutés à leurs noms. Les Ayoubites,
depuis Salah-el-Din, prirent en Égypte le titre de Malek ou roi ; les Mamlouks turkmans ou circassiehs suivirent
le même usage. Les Ayoubites terminaient leurs titres par El-Din [ia religion), au lieu du mot Allah
des khalifes : Salah-el-Din (prononcez Ed^Dîne), le salut de la religion;S ey f-el-D in , le glaive de la religion;
Neytn-el-Din, l’étoile; Ghayat-el-Din, le protecteur. Quelquefois les titres étaient emphatiques ou glorieux,
comme Malek-el-Adel, le roi juste; El-Nasr, le victorieux; ce dernier surnom distingue particulièrement la
race des Mamlouks circassiens. D’autres fois les surnoms indiquaient que celui qui les portait avait été au service
de tel ou tel prince, comme Salehi, qui désignait un serviteur de Melik-Saleh.